(contenu abonné) Le plastique (matière non biodégradable composée de ressources fossiles et d‘additifs chimiques) a envahi notre économie, nos vies, nos écosystèmes et même notre corps. Aussi, agir contre la pollution plastique et microplastique est un défi immense, auxquels les Etats s’attèlent dans le cadre des négociations en cours d’un traité international
A l’association No Plastic In My Sea, nous agissons sur la base des recommandations des scientifiques et appelons à agir sur l’amont du cycle de vie du plastique, à prioriser les solutions de réduction et réemploi et à agir sans tabou sur les plus gros facteurs de risque de pollution, qui sont clairement identifiés.
1/ Penser (et agir) en priorisant la réduction sur le recyclage
Le consensus est aujourd’hui partagé entre scientifiques, associations et États (du moins les plus progressistes) : nous ne viendrons à bout de la crise de la pollution plastique qu’en réduisant la production, qui est aujourd’hui exponentielle et incontrôlée (nous avons produit et consommé plus de plastique depuis l’an 2000 que dans le siècle précédent et les prévisions prévoient un triplement en 2050 !). Rappelons également, que tous les plastiques ne se recyclent pas et que le nombre de recyclages d’un déchet plastique est très limité.
Si le consensus scientifique et la parole politique sont posées, les résistances de certains acteurs sont fortes. Mais, il est de notre responsabilité collective d’agir sans attendre. Pour les entreprises cela implique d’arrêter de se focaliser uniquement sur le recyclage. La réduction de la production de plastiques à usage unique (et notamment des emballages) est incontournable et elle est rendue possible par une multitude de solutions : écoconception, changement du couple produit emballages (produits solides et à diluer), vrac, réemploi…
Pour les particuliers et les acheteurs publics et privés, réduire le plastique à usage unique est aussi le maître mot et notre association propose de nombreux outils (test en ligne de son empreinte plastique, No Plastic challenge, rapport référençant 500 solutions…) en libre accès sur www.noplasticinmysea.org
2/ Réduire drastiquement les produits les plus polluants, notamment la bouteille plastique
Nous disposons d’une connaissance qui nous permet d’être plus efficients en ciblant les plastiques à usage uniques les plus retrouvés dans l’environnement. La commission Européenne les a clairement identifiés dans une étude d’impact de 2018. La bouteille plastique est le premier déchet plastique à usage unique retrouvé sur les plages en Europe, suivie par le mégot (le filtre est en plastique). Depuis 2018, les ramassages confirment la surreprésentation des bouteilles et mégots et une hausse des déchets de la restauration à emporter.
Rien d’étonnant. En France, nous consommons plus de 15 milliards de bouteilles en plastique par an, jetons au sol 30 milliards de mégots (filtre en plastique) et avons augmenté de 30% le recours à la restauration à emporter ou livrée en quelques années !
Il y a urgence à réduire ces 3 sources de déchets plastiques à usage unique.
Notre eau du robinet de qualité est un atout formidable pour diviser par deux d’ici 2030 les bouteilles en plastique, comme le prévoit la loi AGEC.
Pour les mégots et la restauration à emporter, le gros enjeu est de réduire mais également de changer les offres. Les associations anti-tabac militent même pour l’interdiction du filtre ! Et côté restauration, le réemploi des contenants qui est maintenant obligatoire dans les restaurants devra se mettre en place pour l’activité à emporter et livrée. Il n’est pas pensable que nos cœurs de villes et paysages continuent à crouler sous les déchets de ce secteur.
3/ Agir sur les angles morts : microplastiques, plastiques cachés …et la stratégie industrielle délétère de la pétrochimie
La pollution plastique est systémique, protéiforme (visible et invisible du fait des micro et nano plastiques) ; elle touche tous les éco-systèmes, au point de créer des pluies de micro plastiques et des pathologies dues à l’ingestion et l’inhalation de micro plastiques.
Les plastiques cachés sont nombreux et contribuent fortement à la pollution plastique : ainsi 70% de nos vêtements sont synthétiques (c’est-à-dire issus de fibres plastiques, elles-mêmes provenant de ressources fossiles) et relarguent des microplastiques au lavage ; les contenants jetables en carton contiennent une couche de plastique ; les filets de pêche sont en plastique et contribuent fortement à la pollution des océans…les exemples sont légion et méritent d’être mieux connus, là encore pour réduire les sources les plus importantes de pollution et agir efficacement contre ce fléau.
L’autre angle mort majeur est celui de la stratégie industrielle du secteur pétrochimique, qui mise sur la croissance du plastique pour compenser les pertes à venir sur les carburants. Des centaines de sites de production de plastique sont en cours de construction dans le monde et la première urgence est d’enrayer cette fuite en avant.
Un défi pour les Etats et la finance, qui devra déplastifier et non plus seulement décarboner.