(contenu abonné) CSRD signifie : Corporate Social Responsibility Directive. Il s’agit de la nouvelle norme de reporting de développement durable des entreprises européennes. Elle entrera en vigueur progressivement dans un peu plus d’un an, en janvier 2025.
Le législateur européen a mis au point la CSRD comme nouveau standard car les rapports annuels dans ce domaine ne sont pas assez standardisés. De ce fait, comparer les performances sociales et environnementales des entreprises d’un même secteur s’avère difficile. En outre, L’Union Européenne en a profité pour imposer la publication de ces rapports aux entreprises de plus de 250 salariés (alors qu’actuellement l’exigence pèse sur les entreprises de plus de 500 personnes)[1].
1- Acquérir la compétence
Ce nouveau dispositif européen est assez complexe. Les informations à publier sont réparties en 12 catégories appelées ESRS (European Sustainability Reporting Standard) qui contiennent elles-mêmes 82 rubriques (Disclorure Requirements) où l’on trouve la liste des indicateurs à publier (appelés datapoints). Il y en a 1178, ce sont des données normées.
Une entreprise donnée n’aura à publier qu’un sous-ensemble restreint de ces 1178 indicateurs. La règlementation prévoit, en effet, que chaque organisation procède à un tri selon une méthode appelée « matrice de matérialité » visant à ne garder que les sujets sur lesquelles elle a vraiment un impact. Le nombre final de données à produire variera beaucoup d’un secteur à l’autre mais l’ordre de grandeur des indicateurs à produire devrait dans la plupart des cas se situer entre 50 et 100, ce qui demeure important.
A l’évidence, un travail d’immersion approfondie dans cette nouvelle réglementation est incontournable car, pour l’appliquer, il faut maitriser la structure du référentiel CSRD, son millier d’indicateurs possibles, la méthode de la matrice de matérialité, les exigences de traçabilité… Rappelons que le rapport de performance extra-financière et son processus d’élaboration seront audités par les commissaires aux comptes.
2 – S’y mettre sans attendre
Ce nouveau reporting de durabilité est à produire au début de l’année 2025 sur la base des données de l’exercice 2024 pour les entreprises de plus de 500 salariés et l’année suivante pour celles qui comptent de 250 à 500 personnes. Il concerne de nombreuses directions et requiert donc de la coordination. Il impose, de surcroit, de produire des données que l’entreprise n’a pas gérées jusque-là. Celles qui sont déjà concernées par le reporting extra-financier ont un effort important à consentir pour se mettre en conformité. Il n’est pas rare que leur rapport actuel ne couvre que 30 % des obligations du rapport futur. Pour les entreprises de plus petite taille (entre 250 et 500 salariés), la charge de travail est encore plus importante puisque, très souvent, tout est à construire.
Pour ces raisons, il est hasardeux d’attendre.
3 – Prévoir un outil
Il est recommandé de mettre en place un outil numérique de reporting extra-financier pour gérer la CSRD. Cela rajoute du délai au projet : plusieurs solutions existent sur le marché. Il faut donc les étudier, en choisir une, la paramétrer, etc.
Dans de nombreuses entreprises, la solution technique actuellement utilisée n’est autre qu’Excel. Pour toutes les structures composées de plusieurs entités à consolider, Excel est une solution fragile. Il est donc fortement conseillé de prévoir un outil accessible par internet, permettant une saisie décentralisée des données et une consolidation automatique. Il s’agit certes d’un investissement à l’origine mais qui sera amorti dès la 2ème année.
4- en faire une opportunité
La réaction dominante, lorsque survient une nouvelle contrainte réglementaire, est négative : les dirigeants essaient d’abord d’y échapper, puis obtempèrent mais à contre-cœur et final mettent en place une solution a minima. C’est normal, c’est humain.
Il y aurait certes à dire sur la CSRD mais à quoi bon râler contre la pluie glacée en hiver ?
Nous vivons une période singulière où les défis environnementaux deviennent aussi des risques opérationnels palpables. Antérieurement, le réchauffement était une menace abstraite et future mais les entreprises qui ont souffert récemment d’inondations ou de pénurie d’eau ne conjuguent plus le changement climatique au conditionnel ou au futur. En outre, celles qui souffrent de flambées de prix de l’énergie ou des matières premières parlent plus souvent qu’avant de sobriété voie de frugalité.
Le moment ne serait-il pas venu, puisque la CSRD s’impose de toutes les façons, de mettre en place une démarche RSE vraiment transformative incluant des réductions d’impacts importantes mais qui sont autant de réductions de risques opérationnels ? 20 % de C02 en moins, c’est 20 % d’exposition au risque énergétique en moins.
5- Préparer la suite
Actuellement la CSRD est une exigence de transparence et non de performance. Les impacts négatifs des entreprises sont très importants, qu’importe, il faut simplement les publier selon le bon format.
Qui peut croire qu’on en restera là ?
Nous sommes tous au courant que la transition écologique n’a pas encore véritablement commencé. L’année au cours de laquelle l’humanité aura consommé le plus de charbon, c’est…2023 ! Certains ne se sentiront pas concernés car cette consommation n’a pas lieu en France mais plutôt en Chine (qui consomme la moitié du charbon mondial chaque année…). La Chine étant un grand fournisseur de la France.
Voici une dernière suggestion : faire de la CSRD la première brique d’un plan stratégique de résilience de l’entreprise à 10 ans.
[1] Les critères exacts sont plus nombreux que le nombre de salariés mais nous n’entrons pas ici dans les détails