Quel est le point commun entre Ecoplaso, au Brésil, qui transforme des épluchures de fruits et légumes en bioplastiques, The Living Light, à Amsterdam, qui utilise les plantes pour produire de la lumière ou Biogrün, une application imaginée au Mexique pour combattre le gaspillage alimentaire ? Réponse : ces trois projets figurent parmi les lauréats du “Clean Energy Challenge” lancé par l’organisation “What Design Can Do” avec le soutien de la fondation Ikea et des Nations Unies.
What Design Can Do a été créée à Amsterdam en 2011 : cette organisation s’est donnée pour but de montrer que le design est bien plus que la création de beaux objets. “J’ai voulu construire une communauté pour encourager les gens à mettre à profit le design pour faire face à des enjeux mondiaux complexes ”, expliquait Richard van der Laken, le CEO et co-fondateur de What Design Can Do lors de son intervention à la conférence Adobe Max fin 2020. A travers des conférences et des “challenges”, What Design Can Do mobilise les designers du monde entier pour apporter des solutions à des problématiques environnementales ou sociales.
“Refugee Challenge” (2015-2017), “Climate Action” (2017-2018), “No Minor Thing” (2018), “Clean Energy” (2018-2019) : les concours successifs ont permis de constituer un inventaire à la Prévert de solutions en provenance du monde entier. Les lauréats, sélectionnés par un jury indépendant, intègrent ensuite un programme d’accélération pour faire en sorte que leurs projets se concrétisent. Le dernier concours en date, le “Clean Energy Challenge”, a attiré pas moins de 452 projets candidats, en provenance de 52 pays. Vingt lauréats ont ensuite été sélectionnés parmi des centaines d’objets, d’applications mobiles, inventions “low tech” ou high-tech, concepts de services et autres campagnes de sensibilisation innovantes.
“Quand les créateurs participent à un challenge et sont sélectionnés comme lauréats, nous leur donnons de l’argent pour développer leurs idées. Puis nous leur ouvrons les portes d’un programme de développement afin qu’ils puissent transformer leurs idées en prototypes, en business plans, et en produits et services prêts à être commercialisés”, précise Richard van der Laken. Glaciers artificiels, université verticale, “Waste Transformer”... la diversité des projets récompensés illustre bien la créativité et l’inventivité des designers du monde entier.
A Delhi, par exemple, Ant Studio a imaginé un purificateur d’air et climatiseur aussi fonctionnel qu’esthétique, en s’appuyant sur des techniques et matériaux traditionnels, mais en les perfectionnant. Un autre lauréat, Solar Visuals, aux Pays-Bas, propose des panneaux solaires photovoltaïques qui se fondent totalement dans la façade des bâtiments, pour faciliter leur utilisation par les architectes. Quant à son compatriote Iconic Energy Storage, il suggère de transformer les châteaux d’eau désaffectés du pays en solutions de stockage d’énergie, plutôt que de les détruire.
L’organisation s’attaque désormais à un nouveau défi environnemental : les déchets, avec son “No Waste Challenge” lancé en janvier 2021. Dans le cadre de ce nouveau concours, les organisateurs attendent des projets “excitants, réalisables, potentiellement déployables à grande échelle et répondant à l’un des trois enjeux identifiés”. Les trois enjeux en question étant “Take Less” (limiter le recours aux ressources naturelles), “Make Better” (concevoir des produits et services plus vertueux) et “Handle Smarter” (valoriser les déchets et en produire moins).
Pour apporter une dimension à la fois concrète et internationale aux solutions proposées, sept villes aux problématiques bien spécifiques ont également été identifiées, afin de guider le travail des designers : Amsterdam, Delhi, Mexico, Nairobi, São Paulo, Rio de Janeiro et Tokyo. Les candidatures sont ouvertes jusqu’au 1er avril 2021.
“Les designers sont dans une position unique pour changer la façon dont les choses sont fabriquées et de quoi elles sont faites. De nombreux créateurs ont déjà commencé à jouer un rôle actif dans la transition vers une économie circulaire, que ce soit en expérimentant dans les matériaux et les processus, en sensibilisant le grand public ou en imaginant de nouveaux discours autour de la réutilisation des déchets, explique Richard van der Laken. Mais il y a encore beaucoup plus de potentiel. Aujourd’hui, plus que jamais, la communauté des designers doit se mobiliser, s’approprier ces sujets et passer à l’action”. Qu’ils travaillent sur des concepts de communication, des objets ou des services, les designers ont clairement une carte à jouer pour influencer – positivement – le futur de nos villes et de nos modes de consommation.