Premier Groupe coté en bourse à devenir Entreprise à Mission, Danone ne cesse de surprendre par la puissance de ses engagements en matière de RSE. Malgré le récent départ de son président Emmanuel Faber, figure de l’entrepreneuriat engagé, le géant laitier reste convaincu et convaincant. Rencontre avec Laurence Peyraut, Secrétaire Générale de Danone France pour parler du futur qui commence maintenant.
The Good : Quelles sont les mesures clés de la feuille de route RSE de Danone « Objectifs 2025 » ?
Laurence Peyraut : Chez Danone, nous sommes convaincus qu’une croissance est durablement rentable si elle est responsable et respectueuse de son écosystème. Cette conviction s’inscrit pleinement dans l’ADN de l’entreprise depuis toujours. En 2020, nous avons porté cette mission encore plus loin en devenant la 1ère entreprise à mission du CAC 40. Cela signifie que nous l’avons inscrit dans nos statuts pour qu’ « apporter la santé par l’alimentation au plus grand nombre » insuffle l’ensemble de nos prises de décisions stratégiques. De plus, nous avons l’ambition que l’ensemble des entités de Danone en France soient certifiées B Corp d’ici à 2025. Pour atteindre ces objectifs, nous avons défini une feuille de route qui s’articule autour de 4 piliers afin d’agir concrètement et de façon durable. Nous agissons également main dans la main avec nos partenaires en faveur de la préservation de la planète pour garantir le renouvellement de nos ressources. Cela se traduit au quotidien par un accompagnement de nos partenaires agricoles pour accélérer la transition de nos modèles de production.
Notre volonté est que 100% de nos ingrédients cultivés en France soient issus de l’agriculture régénératrice d’ici à 2025. Au-delà de l’amont agricole, nous faisons évoluer et imaginons les emballages de demain pour qu’ils protègent nos produits laitiers et d’origine végétales, nos petits pots et nos eaux minérales naturelles. Nous renforçons nos actions en faveur d’une économie circulaire des emballages pour que d’ici à 2025 100% de nos emballages soient recyclables, réutilisables ou compostables. Vous l’aurez compris, nous avons à cœur de transformer nos modèles avec nos équipes. Nos collaborateurs sont acteurs du projet de l’entreprise grâce au modèle « Une Personne, Une Voix, Une Action », qui donne à chacun le pouvoir d’avoir un impact sur les décisions de l’entreprise. Enfin, nous avons la volonté de promouvoir une croissance inclusive en soutenant l’égalité des chances et en œuvrant pour rendre accessible l’alimentation au plus grand nombre pour ceux qui en ont le plus besoin.
The Good : Quels sont les enjeux spécifiques liés à l’alimentation durable et responsable ? Comment les dépasser ?
L.P. : Je pense que nous sommes aujourd’hui à un tournant historique pour agir. Il y a selon moi, 3 niveaux d’actions pour proposer une alimentation durable et responsable. Il est nécessaire de construire une dynamique collective avec l’ensemble des acteurs afin de créer de la valeur à chaque niveau de la chaîne alimentaire, de la fourche à la fourchette. En premier lieu, nous souhaitons proposer une alimentation produite de manière vertueuse et responsable, issue d’ingrédients français le plus possible. Pour ce faire, il est important de s’engager aux côtés des femmes et des hommes qui cultivent la terre et de soutenir les filières agricoles, notamment celles en difficulté. C’est ce que nous faisons à titre d’exemple avec le Programme Sauvez Williams de Blédina pour accompagner la plantation de 40 000 poiriers en France et soutenir les arboriculteurs par un accompagnement financier à long-terme.
Le second levier s’applique dans notre force d’innovation produit pour s’adapter et répondre aux attentes des Français. Notre volonté est de partir de la matière brute fournie par nos agriculteurs partenaires pour proposer des recettes saines, simples et variées. Nous travaillons donc sur la simplification de nos recettes mais également sur nos emballages pour qu’ils soient les plus durables possibles tout en étant adaptés aux modes de consommation.
Enfin, le dernier levier se trouve dans l’acte d’achat, avec les Français. Il y a aujourd’hui une volonté profonde d’une partie de nos concitoyens de soutenir des recettes issues d’une agriculture durable et locale. Pour cela, nous avons un rôle à jouer en renforçant la transparence de nos recettes, en reconnectant les Français à la terre et au monde agricole et en leur donnant la possibilité de contribuer à la construction du futur de l’alimentation notamment via le financement participatif avec la plateforme MiiMOSA. En quelques années, plus de 150 agriculteurs ont été soutenus et plus de 150 000€ de contribution des citoyens français ont déjà été collectés.
The Good : Creuset d’une alimentation durable, l’agriculture connaît bien des enjeux. Comment Danone se positionne-t-il sur la question de l’amont agricole et comment accompagner les agriculteurs dans des pratiques régénératrices ?
L.P. : Nous souhaitons accompagner nos agriculteurs partenaires vers des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement, car nous sommes convaincus que la santé et l’agriculture sont liées et qu’une agriculture différente apporte une réponse aux défis climatiques. C’est le choix que nous avons fait et que nous avons posé avec l’agriculture régénératrice. Avec l’ensemble des forces vives et les 2 000 agriculteurs partenaires avec lesquels nous travaillons, nous accompagnons l’émergence d’une agriculture respectueuse des sols et de la biodiversité, des femmes et des hommes qui cultivent chaque jour la terre et du bien-être animal.
Avec 40 millions d’euros investis, 7 programmes d’accompagnement techniques et financiers et 44 projets pilotes, nous souhaitons co-construire avec notre écosystème agricole et nos différentes parties prenantes, un modèle vertueux et inclusif qui contribue à la restauration des écosystèmes, à la lutte contre les défis environnementaux et sociétaux actuels et assure un système agro-alimentaire résilient pour nourrir les générations futures. Cela passe notamment par une contractualisation à long-terme avec 100% de nos éleveurs laitiers et l’intégration des coûts de production dans la définition des formules de prix.
Cela se traduit également par l’accompagnement vers des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement et assurant à terme sa préservation. En 2018, nous avons lancé le programme « Les 2 Pieds Sur Terre » qui s’inscrit pleinement dans la démarche filière Ferme Laitière Bas Carbone. L’objectif de ce programme est de réduire l’empreinte carbone des exploitations (-15% à horizon 2025) et d’améliorer la santé des sols. En 2020, nous souhaitions aller encore plus loin et proposer de travailler sur la réduction des coûts de production dans les exploitations afin d’améliorer leur revenu disponible de 15% d’ici à 2025. Notre ambition commune et partagée est de tendre vers un modèle plus résilient et plus vertueux, créateur de valeurs pour tous.
The Good : Au-delà de la sécurité alimentaire et de votre investissement dans une agriculture régénératrice, un de vos champs d’action principal est le marketing responsable. Comment celui-ci se compose-t-il et quels sont les key learnings de que vous tirez de sa mise en pratique ?
L.P. : Depuis plusieurs années, les Français sont de plus en plus attentifs à la provenance des ingrédients, à la façon dont les recettes ont été produites et leur composition, aux actions concrètes des marques et à l’éthique des entreprises. Ils souhaitent être bien informés et ils ont raison car à travers leur acte d’achat, ils peuvent contribuer à un modèle agricole et alimentaire qu’ils choisissent en pleine connaissance de cause.
Nous avons donc lancé en 2018 le site Danone.fr sur lequel nous répondons aux questions les plus récurrentes sur nos recettes et nos engagements. Un gage de transparence que nous nous imposons également sur nos packagings en affichant le Nutri-Score sur 98% de nos produits laitiers. L’emballage est également un outil utile pour sensibiliser à des gestes respectueux pour la planète et simples tel que celui du recyclage. Et c’est aussi une occasion pour confirmer nos engagements. Sur la gamme Les Récoltes Bio de Blédina par exemple, nous expliquons les objectifs de la marque de proposer des ingrédients 80% d’origine France et d’accompagner nos partenaires agricoles.
The Good : Production, communication, coalition : quel est le plus épineux des chantiers du Good pour une entreprise comme Danone ?
L.P. : Pour accélérer la transition de nos modèles et répondre à ce que nous nommons « la révolution de l’alimentation », je suis convaincue que nous devons arrêter de travailler en silo et réfléchir en logique de filière. Seules des coalitions et des mobilisations collectives peuvent faire bouger les lignes efficacement et durablement.
Dans une coalition, chaque partie-prenante à ses enjeux et ses réalités. L’objectif est de créer de la valeur partagée et équilibrée pour tous en s’appuyant sur les forces et les savoir-faire de chacun afin de porter des projets d’avenir à impact pour l’agriculture et l’alimentation. C’est le sens du Programme ReCultivons lancé en mars 2021. À travers ce programme, Blédina et ses partenaires Pour une Agriculture Du Vivant et MiiMOSA, mettent en place des actions concrètes pour accélérer la transition vers une agriculture plus locale, plus durable et plus proche des Français. Il vise également à soutenir et valoriser le métier d’agriculteur si essentiel aujourd’hui. J’incite ainsi tous les acteurs de la filière à travailler ensemble, partager et communiquer sur leurs réussites et les freins rencontrés pour adresser les différents enjeux auxquels nous faisons face et ainsi accélérer l’émergence de solutions d’avenir pour la santé et pour les hommes.
The Good : Un retour d’expérience que vous souhaiteriez partager à vos confrères et consoeurs pour les aider dans leur transition ?
L.P. : La gouvernance ! C’est précisément mon cheval de bataille parce j’y vois la possibilité de traduire les intentions en actes. En 2017, l’entreprise a posé une nouvelle vision « One Planet, One Health » qui souligne notre engagement pour la planète et la santé. Cette vision nous engage dans une nouvelle gouvernance qui a pour rôle de nous assurer que ce que nous proposons aux consommateurs soit respectueux de la santé et de la planète. Par exemple, la création d’un comité One Planet. One Health en France permet de construire notre feuille de route et garantir la cohérence de nos actions. Sommes-nous parfaits pour autant ? Non. A-t-on toujours les solutions clés en main pour, par exemple, remplacer demain des bouteilles en plastique par des matériaux non fossiles ? Non plus.
En revanche, en matière de circularité nous avons l’ambition d’utiliser 100% de matériaux recyclables et bientôt recyclés pour toutes nos bouteilles. Bien sûr, cela ne sera pas suffisant et nous devons continuer à chercher par tous les moyens à sortir des énergies fossiles. Dans la même veine, c’est aussi le sens de l’inscription dans nos statuts de notre mission en 2020 qui nous permet de fixer un cap et de s’engager pour mener à bien des projets qui ont du sens, qui sont responsables et créateurs de valeurs partagées par et pour tous, nos consommateurs, nos partenaires et nos collaborateurs. Nous sommes engagés dans une démarche de progrès. Le partage d’expérience et l’innovation contribueront j’en suis sûre à construire un futur durable.