Chaque mois, un.e membre du collège des Directeurs du Développement Durable partage avec la communauté de The Good son chemin vers l’impact. Quels ont été ses déclics ? À quels enjeux il/elle est confronté.e dans son quotidien professionnel ? Quelles sont ses fiertés ? Cette semaine, c’est Dominique Cwikula De Tomasi, Directrice Développement durable et Présidente du comité du Développement Durable Atlanterra Agriculture Durable, qui prend la plume pour nous partager son expérience.
Après un baccalauréat littéraire, je me suis tournée vers des études de droit. Très vite, j’ai décroché et cumulé des petits boulots. Mon beau-frère, Cyril Rollinde, fondateur de Arandi, qui œuvre pour le financement de l’entreprenariat à impact, bien implanté dans l’économie sociale et solidaire m’a proposé un coup de pouce. C’est donc grâce à lui et au statut “Emploi jeune” que j’ai rejoint le Centre des Jeunes Dirigeants et des Acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire (CJDES) en tant que webmaster. J’y ai découvert qu’un « autre monde était possible », à travers l’Économie Sociale et Solidaire. Il ne s’agissait pas de refaire le monde, il s’agissait d’envisager le monde avec un autre regard, via d’autres critères en considérant l’Humain, l’environnement, le sens. J’ai eu la chance de participer, modestement, à la création du bilan sociétal. Il s’agissait via une grille de critères très complète, d’évaluer le niveau « sociétal » d’une structure, comprendre les besoins et les attentes des collaboratrices et des collaborateurs, apprécier le bien-être au travail…. A l’époque nous étions regardés de manière très sceptique. Aujourd’hui l’indice d’égalité femmes-hommes, les critères d’inclusion etc. sont au cœur des stratégies des entreprises.
Cette expérience professionnelle, cette chance qui m’a été donnée ont forgé mes valeurs professionnelles, le cadre dans lequel j’allais développer et tracer ma voie. Après 4 ans passés au sein de l’association et un master, je suis entrée dans le monde du conseil, dans une structure quasi familiale, où je suis intervenue, majoritairement, dans des mutuelles, ce qui m’a permis de consolider mes acquis et de renforcer les valeurs de solidarité et de fraternité.
15 ans plus tard, Cyril Rollinde, m’a contactée pour suivre une formation sur ISO 26000, avec l’agence LUCIE. D’un naturel curieux, je m’y suis plongée, malgré le fait que ces sujets me semblaient éloignés de mon cœur de métier – à l’époque je venais de créer E’LO, une entreprise d’accompagnement en transformation numérique. Mais après 3 jours de formations pour apprendre à mettre en place une démarche RSE et élaborer un plan d’action opérationnel prenant en compte les parties prenantes et les enjeux stratégiques d’une structure, le naturel est revenu au galop : cette expérience a conforté ma conviction que les impacts sociaux et environnementaux mais aussi que les sujets plus vastes autour de la citoyenneté et de ce qui est moral (dans le sens noble du terme) sont aussi importants que l’impact financier. Je suis convaincue que c’est la recherche de l’équilibre entre tous ces impacts qui constitue le terreau d’une activité qui a du sens et qui concourt à un mieux vivre.
J’ai commencé à voir mon activité de manière différente, en prenant en compte la sobriété et à sensibiliser mes interlocuteurs à ce sujet. Il y a un an, j’ai eu la chance d’être embarquée, par l’ancien Directeur du développement du Groupe VYV, Jean-Louis Mercier, dans une aventure agricole : Atlanterra Agriculture Durable. Créé début 2021, le cabinet conseille les investisseurs dans l’acquisition de terres agricoles ou forestières dans l’espace Schengen, accompagne les agricultrices et agriculteurs dans leur installation et la transformation de leurs pratiques agriculturales et/ou sociétales vers des modèles (plus) durables. En tant que Directrice du développement durable et Présidente du comité du développement durable, au quotidien, je m’efforce de concilier le sociétal et l’environnement, de mettre en œuvre des stratégies de développement durable sur plusieurs plans dont la conservation des sols, l’eau, la biodiversité, une rémunération juste, le partage de la valeur, les formations, la recherche sur les modèles de gouvernance, la qualité des produits, la traçabilité et sécurité, l’inclusion, le développement territorial…. tous ces sujets qui sont centraux lorsque l’on s’intéresse à l’alimentation de demain dans un monde contraint par les ressources et le changement climatique.
Mon travail consiste à guider nos parties prenantes, les accompagner, les sensibiliser, les aider à piloter sur la base de critères environnementaux, sociétaux, citoyens, trouver des solutions. Mes moyens sont étendus : consultations de nos Parties Prenantes, mesures des externalités, bio mimétisme, agriculture de conservation des sols, bilans sociétaux, labellisations, design etc…. Nous avons mené déjà de très beaux projets : consultation de nos parties prenantes sur les enjeux majeurs ESG de demain, interviews de plusieurs agricultrices et agriculteurs sur “qu’est-ce que l’agriculture en France ?” En début d’année, Atlanterra Agriculture Durable est devenue Société à mission.
Notre adhésion au C3D me permet d’ailleurs de confronter mes positions, mes avis, d’échanger avec mes pairs, d’apprendre aussi. C’est un partenariat très enrichissant.
D’autres personnalités m’aident dans mes décisions quotidiennes : ma fille Paloma, mes nièces Chloé et Natacha Rollinde. Du haut de leurs 8, 21 et 27 ans, elles ont un regard totalement différent, une approche disruptive par rapport à la mienne. Elles bousculent totalement mes bases, elles me permettent de me challenger continuellement. Ma fille, parce que ce qui nous paraît être une révolution semble être une évidence, rendant le changement finalement beaucoup plus simple. Chloé et Natacha parce que, respectivement en tant que designer au sein de l’École Strate, et doctorante en urbanisme, voient déjà les choses sous un autre angle. Toutes deux en particulier ont activé le mode « responsabilité sans culpabilité », avec un vrai désir de co-construction, de développer ensemble les solutions qui permettront aux générations futures de vivre dans un environnement sain écologiquement mais aussi socialement.
Ainsi, j’enrichis petit à petit ma façon de mener des projets, combinant ma compréhension des sujets via l’économie sociale et solidaire, ma connaissance des normes et règlements mais aussi ma curiosité pour le design, outil indispensable aux transformations et une forme d’engagement responsable voire militant. Enfin, j’ai découvert, lors du salon BIOMIM Expo 2021, la philosophe Gabrielle Halpern qui traite de l’hybridation, j’ai acheté son livre “Tous centaures” sa réflexion est fascinante et montre comment les synergies sont possibles et comment elles sont aujourd’hui bridées. Parce qu’on apprend tous les jours.