Une énième COP mène les diplomates du climat au Proche-Orient pendant que la guerre rallume les centrales à charbon. Mais ils vont surtout parler d’argent. De leur côté les défenseurs de la planète ne manifestent pas contre la guerre et ses fauteurs, mais s’en prennent aux œuvres d’art ou s’allongent sur les chaussées… Les boussoles sont-elles à ce point affolées qu’on ne sait plus à quel saint se vouer ? Il faut mettre un peu de cohérence et de raison dans les esprits :
Rappeler que l’Accord de Paris prescrit de parvenir à la neutralité carbone avant la fin du siècle. Ce n’est pas donc pas en 2050, même s’il est loisible d’accélérer. Que par ailleurs la limite d’augmentation de température à ne pas dépasser, c’est 2°C en 2100, même s’il est souhaitable de faire mieux. Ceci pour mettre en garde contre les surenchères qui conduisent à des échecs désespérants. Or le désespoir est l’ennemi de l’action.
Que cet accord enjoint à chaque Etat de définir et mettre en œuvre sa politique climatique, donc à la France d’avoir la sienne qu’elle place largement sous la houlette européenne. Une coopération mondiale serait nécessaire, mais elle est actuellement hors de portée.
Qu’il est faux de vitupérer l’inaction climatique. La migration vers l’électrique représente pour l’industrie automobile européenne une éprouvante et périlleuse révolution. Il faut donc aider cette révolution plutôt que l’entraver. A cet égard il est capital d’avoir un programme national d’équipement des voies rapides en infrastructures de recharge jusqu’en 2030.
Qu’on aura encore besoin de carbone. Par exemple pour les avions. Où trouve-t-on du carbone non fossile sans concurrencer l’agriculture ? Dans l’atmosphère pardi puisqu’il y en a trop. L’avenir devrait voir combiner le carbone soustrait à l’atmosphère avec l’hydrogène bas carbone fourni par l’industrie pour produire des carburants de synthèse, les SAF. En attendant on doit apprendre à capturer, stocker ou utiliser le CO2 émis par les industries émettrices. La France ne doit pas manquer ce rendez-vous.
Après les transports, les bâtiments. L’attention a été portée à l’isolation et à l’économie d’énergie plus qu’à la décarbonation, qui touche à la qualité de l’énergie. Il faut désormais que l’énergie soit à la fois décarbonée et économisée. L’électricité, curieusement pénalisée depuis plus de dix ans, fait son retour avec les pompes à chaleur qui, pour une dépense d’énergie de 1, en rapportent 3 à 4 fois plus, sous forme de chaleur captée à l’extérieur du bâtiment. Bonne à tout faire, la pompe à chaleur pourvoit à l’efficacité énergétique, la décarbonation, le confort et la création d’emplois. La France a besoin d’un grand plan pompes à chaleur.
L’électricité décarbonée devient donc, associée à la chaleur d’origine renouvelable, l’énergie première de la France, celle qui prend la place des énergies fossiles. C’est pourquoi le gouvernement doit assurer sa production, autant par les sources renouvelables que par les centrales nucléaires, et veiller à la modernisation de son transport, de son stockage et de sa distribution. C’est notamment l’objet des lois d’accélération débattues au Parlement. Les règles européennes de formation des prix de gros des énergies devront refléter les coûts d’approvisionnement tout en assurant le financement des investissements nécessaires.
Electricité décarbonée, bornes de recharge, carburants de synthèse, pompes à chaleur, voilà quatre directions pour réduire les émissions de gaz nocifs et rassurer les angoissés du climat. C’est un tel plan qu’il faut soutenir en devenant les entrepreneurs et les artisans de sa réussite, et non les morts-vivants d’une survivance malheureuse. Parce qu’il y faut des compétences, des bras, des financements, de la ténacité. Parce que c’est non seulement possible, mais aussi passionnant.