27/06/2023

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Greta Thunberg à Paris à l’occasion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial

Greta Thunberg, Vanessa Nakate, Ineza Grace ou Camille Etienne…les jeunes activistes du climat étaient venues en force cette semaine, à l'occasion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial organisé les 22 et 23 juin dernier destiné à réformer le système financier issu de l’accord de Bretton Woods, inadapté à l’enjeu climatique...

Greta Thunberg, Vanessa Nakate, Ineza Grace ou Camille Etienne…les jeunes activistes du climat étaient venues en force cette semaine, à l’occasion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial organisé les 22 et 23 juin dernier destiné à réformer le système financier issu de l’accord de Bretton Woods, inadapté à l’enjeu climatique et défavorable aux pays en développement. L’engagement de la jeune garde du climat peut-il faire bouger les lignes ? C’est en tout cas le pari de ces militantes déterminées pour qui l’engagement n’est pas un choix mais une nécessité.

« Quand j’étais petite, je voulais devenir pilote. J’ai commencé des études d’ingénieur et me suis rendue compte que le changement climatique était l’une des plus grandes menaces pour le monde et l’Afrique, que ma communauté était en première ligne mais qu’elle n’était pas représentée. C’est pour faire entendre notre voix que je suis devenue activiste », raconte l’écoféministe rwandaise Ineza Grace. Comme elle, une dizaine de jeunes activistes du climat étaient réunies la semaine dernière à Paris à l’occasion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Celui-ci était destiné à restructurer un système financier hérité de la seconde guerre mondiale et désormais inadapté aux grands défis du XXIème siècle comme la dégradation de l’environnement et la lutte contre les inégalités. 

Ainsi, malgré des discussions quasi systématiques sur le financement climatique lors des COP annuelles sur le changement climatique, l’incapacité des pays du Nord à débloquer les montants nécessaires à l’atténuation, l’adaptation et les « pertes et dommages » pour les pays en développement est devenue un symbole de la fracture climatique entre le Sud et le Nord. « C’est une question de justice », soulignent les jeunes militantes. « Nos pays ont été conditionnés pour exploiter leurs richesses naturelles et leur peuple pour maintenir l’économie et le mode de vie des pays du Nord. Et la transition verte poursuit le même schéma de domination », estime Helena Gualinga, militante équatorienne des droits des peuples indigènes d’Amazonie et de la protection de l’environnement.

« Les entreprises qui exploitent les énergies fossiles promettent depuis toujours de sortir les gens de la misère. Mais cela ne s’est jamais produit. “L’or noir” a surtout détruit des vies et accentué la misère. En Afrique, des millions de personnes n’ont toujours pas accès à l’électricité et souffrent de faim », souligne de son côté Vanessa Nakate, militante ougandaise qui lutte notamment contre le projet de pipeline géant de Total dans son pays (EACOP). C’est au nom de ces victimes que celle qui est aussi ambassadrice de l’Unicef a demandé une minute de silence lors de son intervention en ouverture du Sommet pour un nouveau Pacte financier. Et c’est au nom de la « justice » qu’il ne s’agit plus « d’accorder des prêts au pays du Sud pour assurer leur transition ou leur adaptation mais de faire des dons car il s’agit d’une réparation », affirme la jeune philippine Mitzi Jonelle Tan.

Si leur appel à la solidarité climatique et à mettre « les gens avant le profit » sonne juste tant elles ont vécu dans leur chair les inégalités qu’elles décrivent, leur engagement peut parfois sembler vain au vu de l’enlisement de la transformation nécessaire du système économique et financier mais aussi de la répression croissante dont ces activistes font l’objet, partout dans le monde. « Le plus difficile pour moi, c’est de voir la complète dissonance qu’il existe aujourd’hui chez ces gens qui me disent que ce que je fais, « c’est super » mais qui continuent à faire comme si tout allait bien et donc à ne rien changer dans leur vie personnelle et professionnelle », se révolte Greta Thunberg. « En tant que personnes privilégiées qui n’ont pas besoin de lutter pour notre survie au quotidien, nous avons l’obligation de prendre la parole et d’agir. Ne pas le faire est un choix délibéré », estime ainsi l’activiste suédoise venue, en amont du sommet, manifester son soutien à l’organisation Les Soulèvements de la Terre dissoute par le gouvernement français.

Dans ce contexte, quid de l’engagement des entreprises ? Si beaucoup freinent encore la lutte contre le changement climatique par leur lobbying et leur greenwashing, les activistes sont de plus en plus nombreux au sein des structures privées. On voit de plus en plus d’employés ayant un engagement associatif fort dans le climat, des collectifs de collaborateurs se monter pour faire avancer les actions environnementales de leur société et des directeurs RSE se positionner eux-mêmes comme des « corporate activists ». C’est le cas d’Alexandra Palt, passée par le milieu associatif avant de prendre les rênes du développement durable puis de la fondation L’Oréal. L’autrice du livre « corporate activisme », estime œuvrer en tant que tel en challengeant chaque jour le TINA- « There is no alternative » – qui fait les choux gras du « business as usual ». Un oxymore pour une entreprise qui produit du superflu ? Sans doute en partie mais pour elle, une chose est sûre : « l’activisme a contribué à faire prendre conscience aux dirigeants économiques de la nécessité de changer de cap ». Même si cela ne va pas assez vite, pas assez loin, reconnait-elle.

Alors oui, « l’activisme fonctionne » assure la française Camille Etienne. « L’activisme est un mouvement et la lutte est la seule chose qui fait changer la société. Il montre que oui, il existe des alternatives », assure la sociologue et politologue Isabelle Ferreras. Tant mieux, car comme le rappelle Mitzi Jonelle Tan, « nous n’avons pas d’autre choix que le changement ».

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