10/07/2023

Temps de lecture : 3 min

Martell expérimente le cognac bas carbone

(contenu abonné) La célèbre maison de cognac multiplie les initiatives pour concevoir des produits à l’empreinte carbone réduite. Cela passe, notamment, par de nouveaux procédés de viticulture régénératrice et des expérimentations de créations variétales. Une démarche au bénéfice de l’AOC Cognac, qui s’inscrit dans le temps long.

(contenu abonné) La célèbre maison de cognac multiplie les initiatives pour concevoir des produits à l’empreinte carbone réduite. Cela passe, notamment, par de nouveaux procédés de viticulture régénératrice et des expérimentations de créations variétales. Une démarche au bénéfice de l’AOC Cognac, qui s’inscrit dans le temps long.

Avec des produits qui évoluent en fût pendant des décennies, le cognac est un produit du vieillissement. Et quand on est une maison qui a dépassé les 300 ans, le rapport au temps est forcément différent. Mais les problématiques environnementales sont, elles, bien présentes. Aussi, la maison Martell (propriété du groupe Pernod-Ricard) a choisi de concentrer ses efforts vers une réduction de son empreinte carbone. « Dans le bilan carbone de Martell, 4 % des émissions sont liées au scoop 1 et 96 % au scop 3, soit des émissions liées à la chaîne de valeur, précise Sonia Le Masne, directrice sustainability et responsibility Martell – Mumm – Perrier-Jouët. C’est pourquoi nous souhaitons travailler en collectif, pour avancer main dans la main avec nos partenaires. Et ce sont les consommateurs de demain qui évalueront nos pratiques d’aujourd’hui. » L’état d’esprit de Martell ? Tester des idées, les mesurer, en parler pour en favoriser la connaissance auprès des 1 200 viticulteurs qui collaborent avec la maison. Toutefois, il n’est pas question de faire porter le poids des essais aux partenaires : c’est pour cela que Martell fait des 450 hectares de son domaine un véritable terrain d’expérimentations.

Un laboratoire à ciel ouvert

Cela fait désormais plus de dix ans que Martell travaille sur des pratiques de culture plus durables. Le domaine a reçu la Certification Environnementale Cognac (CEC) en 2016 et le zéro herbicide a été atteint en 2019, grâce notamment au partenariat avec la start-up VitiBot dont les robots permettent d’enlever les mauvaises herbes sous les rangs de vignes. Et plus récemment, c’est vers des pratiques de viticulture régénératrice que la maison s’est tournée. L’enjeu ? Favoriser la régénération des sols et l’augmentation de leur fertilité grâce à l’implantation de haies brise-vent et de bandes boisées début 2023, sur une parcelle pilote de 8 hectares. « Nous y avons imaginé un modèle qui n’est peut-être pas encore abouti mais qui permet de tester pendant 30 à 40 ans (soit le temps de vie de la vigne) un écosystème arboré et d’en mesurer l’influence sur la vigne, explique Julien Chadutaud, responsable technique chez Martell. Nous attendons aussi des effets sur la biodiversité. Grâce à la plantation de pruniers et de cerisiers par exemple, l’espace profitera d’une floraison la plus longue possible pour attirer un maximum d’insectes auxiliaires qui nous aideront à faire face aux prédateurs. »

Des résultats partagés à l’ensemble de la filière

De même, pour mieux affronter les différents ennemis de la vigne (comme le mildiou par exemple), Martell a également initié en 2016 un programme de recherches variétales : 300 sortes sont issues du « mariage » entre variétés hybrides, créées spécifiquement avec des gênes de résistance, et variétés locales. Elles ont été plantées, puis vendangées en 2022. Une cinquantaine ont passé l’étape suivante, à savoir la distillation en micro-alambic. Vingt pieds des variétés les plus prometteuses ont été à nouveau plantés fin juin 2023. « La génétique, il faut voir cela comme un outil. Il ne faut pas en avoir peur. C’est comme si nous avions toute une bibliothèque de possibilités et que nous choisissions ce qui pourrait convenir, glisse Julien Chadutaud. Ainsi, à cause du réchauffement climatique, nous recherchons la tardiveté des bourgeonnements. En 2028, nous retiendrons définitivement une, deux ou trois variétés, qui doivent également comporter des caractéristiques gastronomiques… » Et ce n’est pas fini ! Toutes ces paliers franchis, il faudra encore attendre 10 ans d’observation supplémentaires, sur le terrain, pour que le cépage soit éventuellement inscrit au catalogue national des variétés de l’AOC. Car les résultats de ce programme sont en effet destinés à être partagés à l’ensemble de la filière cognac. Le budget consacré à ces innovations reste, lui, confidentiel.

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