06/11/2023

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Restauration de la nature : un texte de l’Union Européenne pour préserver les écosystèmes

La législation de l'Union Européenne sur la restauration de la nature, en cours de finalisation entre eurodéputés et Etats membres, vise à enrayer le déclin de la biodiversité en imposant de réparer les écosystèmes abîmés....

La législation de l’Union Européenne sur la restauration de la nature, en cours de finalisation entre eurodéputés et Etats membres, vise à enrayer le déclin de la biodiversité en imposant de réparer les écosystèmes abîmés.

Pollution, urbanisation, exploitation intensive: selon Bruxelles, 80% des habitats naturels dans l’UE sont dans un état de conservation « mauvais ou médiocre » (tourbières, dunes, prairies particulièrement), et jusqu’à 70% des sols sont en mauvaise santé. En lien avec l’accord international Kunming-Montréal (COP15 Biodiversité), le texte en cours de finalisation entre eurodéputés et Etats membres de l’UE imposerait aux Vingt-Sept d’instaurer d’ici 2030 des mesures de restauration sur 20% des terres et espaces marins à l’échelle de l’UE, puis d’ici 2050 sur l’ensemble des zones qui le nécessitent.

Divers types d’habitats (milieux naturels avec faune et flore spécifiques) sont listés: chaque Etat serait tenu de restaurer d’ici 2030 au moins 30% des habitats abîmés, puis 60% d’ici 2040. Si les eurodéputés souhaitaient restreindre certains objectifs aux zones classées Natura2000, le texte final pourrait simplement autoriser les Etats à restaurer celles-ci en priorité.

Terres agricoles

Dans leur mandat voté mi-juillet, les eurodéputés suppriment complètement l’article concernant les terres agricoles –que les Etats souhaitent désormais rétablir. Sont en jeu des objectifs de restauration des tourbières, précieux puits de carbone: selon la position des Etats, 30% des tourbières drainées utilisées en agriculture devraient être restaurées d’ici 2030 (notamment en les réhumidifiant), 40% d’ici 2040. Des critères seraient fixés pour l’humus, les populations d’abeilles, de papillons des prairies et d’oiseaux des champs. Parallèlement, les eurodéputés proposent d’obliger les Etats à prendre des mesures pour stopper le déclin de la diversité des pollinisateurs d’ici 2030, avant d’en accroître la population, avec une surveillance régulière et harmonisée.

Mentionnée par Bruxelles, l’extension de zones « à haute diversité » (haies, étangs, arbres fruitiers…) sur 10% des terres agricoles à l’échelle de l’UE disparaîtra: il ne s’agissait que d’un objectif indicatif, mais la droite parlementaire en fait une ligne rouge, estimant que cela menacerait les rendements agricoles. Le Parlement plaidait aussi pour conditionner l’application du texte à la publication préalable de données évaluant la sécurité alimentaire.

« Frein d’urgence »

Les eurodéputés ont introduit un dispositif permettant aux gouvernements nationaux de suspendre automatiquement l’application du texte en cas d’impact socio-économique « exceptionnel » (production agricole, logements, énergie…). Les Etats ont approuvé le principe d’un tel « frein d’urgence », mais strictement encadré: il ne pourrait être déclenché que par Bruxelles (pas à l’initiative d’un Etat), uniquement en cas d’impact sur l’offre alimentaire, son périmètre serait restreint et sa durée limitée à un an maximum.

Bruxelles souhaitait imposer un objectif contraignant de non-détérioration (maintien en bon état) sur de vastes zones, y compris hors des aires Natura2000. Les Etats défendent plutôt une simple obligation à prendre des mesures, sans contrainte de résultat. Les eurodéputés sont sur la même ligne, mais la formulation exacte, plus ou moins contraignante, fait débat. Alors que le Parlement souhaitait restreindre la non-détérioration aux écosystèmes ayant bénéficié de mesures de restauration, le périmètre initial, plus large, devrait être rétabli. Des flexibilités pourraient être accordées aux pays couverts majoritairement d’un seul type d’écosystème (pays scandinaves…), et des dérogations sont prévues pour les projets d’énergies renouvelables ou infrastructures militaires.

Pêche

La politique commune de la pêche permet actuellement à un Etat d’adopter des mesures restrictives pour préserver un écosystème marin, mais sans pouvoir les imposer aux flottes des autres pays européens –sauf unanimité improbable de tous les Etats concernés. Pour y remédier, les eurodéputés proposent une disposition obligeant les Etats à trouver une solution rapide en cas de contradiction entre l’activité de pêche et l’objectif de « restauration de la nature », Bruxelles pouvant intervenir in fine pour imposer une mesure appropriée à tous les pêcheurs sur la zone visée.

Villes, forêts, cours d’eau

Le texte obligerait les Etats à ne pas diminuer les espaces verts et arborés en ville, sans nécessairement d’objectifs chiffrés. Il viserait aussi à supprimer les obstacles (par exemple certains petits barrages obsolètes) sur les fleuves et rivières afin d’atteindre « au moins 25.000 km » de cours d’eau « libres » d’ici 2030. Le texte liste des critères pour améliorer l’état des forêts: stockage de carbone, populations d’oiseaux, quantité de bois mort… Sur ce dernier point, des assouplissements seraient prévus pour les pays aux forêts très sèches particulièrement confrontées aux risques d’incendie. Le Parlement a ajouté l’objectif de planter au moins 3 milliards d’arbres supplémentaires dans l’UE d’ici 2030.

Financements

Environ 115 milliards d’euros du budget européen 2021-2027 seront disponibles pour la biodiversité. Bruxelles estime que chaque euro investi rapporterait entre 8 et 38 euros, via les avantages d’écosystèmes sains (dépenses de santé, pollinisation, qualité des sols, moins d’inondations, atténuation climatique, stocks de poissons préservés….). Contrairement à ce que voulaient les eurodéputés, le texte pourrait laisser la porte ouverte pour réallouer des fonds européens de la Politique agricole commune (PAC) et de la pêche à la mise en oeuvre du règlement.

Julien GIRAULT/AFP

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