TheGood : A quelles difficultés concrètes vient répondre cette opération de maillage du réseau d’eau potable?
Christophe Cazorla : Nous sommes confrontés, comme beaucoup de distributeurs d’eau en France, à un problème de ressources en eau potable. Nous avons eu, par le passé, des problèmes d’à sec de certains points d’eau auxquels il a fallu trouver des solutions. Nous avons alors interconnecté certains réseaux pour délivrer de l’eau à des gens qui étaient vraiment en difficulté, puis travaillé sur un maillage du réseau afin d’assurer une distribution équitable sur l’ensemble de notre territoire.
TheGood : Pouvez-vous nous donner un aperçu des besoins de la population et du réseau que vous pilotez ?
Christophe Cazorla : Le territoire compte 9000 abonnés. Chaque année, pour couvrir les besoins en eau potable de sa population, nous prélevons 1,4 million de mètres cubes d’eau. Nous gérons 436 km de réseau d’eau potable, 53 réservoirs et une trentaine de ressources (captages, résurgence, pompages, etc.). Sur ce réseau, les ressources sont très disparates puisqu’il y a des endroits où il y a de l’eau, en plus ou moins grande quantité, et des endroits où il n’y en a pas du tout.
Pour pallier ces difficultés et proposer une distribution uniforme, nous avons donc lancé, l’an dernier, une campagne d’interconnexion afin de mailler les réseaux. L’objectif est de relier les points d’eau potables les uns aux autres ; les unités de distributions les unes aux autres pour avoir une distribution équitable.
Ces opérations sont menées par le SIELL ou Service intercommunal des eaux du Lodévois et du Larzac (SIELLE), qui agit sur le territoire de la Communauté de communes du Lodevois et Larzac. Nous sommes une régie complètement autonome qui réunit de nombreuses compétences. Nous avons une trentaine d’agents dont les métiers vont de l’électromécanicien, au fontainier, en passant par le technicien SIG et un service ordonnancements.
TheGood : Où en est cette campagne d’interconnexion ? Qu’avez-vous réalisé et que reste-t-il à faire ?
Christophe Cazorla : L’année dernière, nous avons interconnecté quatre réseaux. Sur cette année 2024, nous allons en interconnecter deux autres. Tous ne seront pas reliés car certains sont trop éloignés, mais nous interconnectons les plus gros réseaux. Nous avons déjà déployé environ 4 km de tuyaux sur 2023 et sur 2024, nous devons en déployer 6 km. Il en restera quelques-uns à faire par la suite, mais ce sera à la marge.
TheGood : De tels travaux ne se font pas sans mal et sans moyen… A quelles difficultés physiques êtes-vous confrontée et quel est le budget de cette opération ?
Christophe Cazorla : Nous sommes bien évidemment confrontés à des problèmes de terrain car il faut gérer des dénivelés entre les réseaux ; il y a des terrains rocheux, des traversées de route, des traversées urbaines.
En ce qui concerne le budget dédié, les opérations d’interconnection réalisée en 2023 ont coûté 700 000 euros. Et le budget, pour 2024, représentera entre 800 000 et 1 million d’euros, pris en charge par l’Agence de l’eau, le Département et la Communauté de communes, avec une répartition de l’ordre de 60/20/20
TheGood : Votre activité comporte-t-elle un pan « préservation de l’eau » ?
Christophe Cazorla : Nous sommes constamment à la recherche de fuites pour localiser les pertes et les réparer. Cette recherche se fait, entres autres, en écoutant le bruit. L’eau sous pression dans les tuyaux provoque un bruit similaire à celui d’un tuyau d’arrosage qui fuit. Nous utilisons des outils spécifiques, similaires à un stéthoscope, pour localiser précisément les fuites.
Nous avons également eu recours à un chien spécialisé dans la détection des fuites, qui repère, à la surface, l’odeur du chlore présent dans l’eau. Cette méthode a principalement été utilisée sur le plateau du Larzac.
Sur 400 km de réseau, l’an dernier, nous en avons inspecté 180 km et trouvé 90 fuites qui représentaient une perdition instantanée de 102m3 d’eau par heure, soit 2500m3 d’eau par jour. Ce qui représente une piscine olympique par jour…
TheGood : Il a beaucoup plu ces derniers temps… où en sont les ressources ?
Christophe Cazorla : Actuellement, les réserves d’eau sont bonnes, mais s’il ne pleut pas d’ici à octobre, et si nous ne réalisons pas ces interconnexions, nous risquons d’être en difficulté en arrière-saison. On sait que ce qui s’est passé l’an dernier, se représentera. En maillant le réseau, nous préparons l’avenir. C’est un investissement à court et à moyen terme.
TheGood : Est-ce vous qui êtes à l’origine des arrêtés de restrictions d’utilisation de l’eau sur le territoire du Lodévois et du Larzac ?
Christophe Cazorla : Nous sommes en relation avec le Département et la DDTM qui font des mesures régulières. Nos relevés les confortent mais ils ont une vision globale sur le Département et ils réagissent en fonction de ce qu’ils ont eux-mêmes constaté. Ils partent des cours d’eau car ce sont les témoins de ce qu’il y a en réserve. Et ce sont les niveaux de ces cours d’eau qui permettent d’engager des procédures d’alerte
TheGood : Avez-vous changé les canalisations en plomb ?
Christophe Cazorla : Nous renouvelons les conduits au fur et à mesure. Il en reste un peu mais une grosse partie a déjà été enlevée.
TheGood : Quel est l’impact de vos travaux de connexion sur l’environnement ?
Christophe Cazorla : Toutes nos canalisations sont sous les routes car les tuyaux doivent être accessibles afin de pouvoir intervenir rapidement en cas de problème. On reste sous les routes et les chemins. Et, la plupart du temps, c’est le chemin le plus court !