L’événementiel, comme tout le secteur de la communication, traverse une passe complexe. Pour en sortir, il doit se réinventer, trouver de nouveaux moyens de s’opérer, se transformer en son âme et conscience. Oui, mais comment ?
Rappelons d’abord l’essence même de ce qu’est l’événementiel : la promesse d’une rencontre. Se réinventer aujourd’hui signifie aller chercher des nouveaux outils pour rendre possible cette rencontre. Et, en temps de crise sanitaire, le seul moyen de l’organiser est le digital, outil dont chacun s’est emparé en premier lieu pour replacer l’humain au centre ; ce qui est le cœur même de la rencontre et la raison d’être de l’événementiel.
L’événementiel physique d’aujourd’hui ne peut plus exister tel qu’hier. Organiser un salon avec 50 000 visiteurs ou un concert avec 250 000 auditeurs n’est plus envisageable et, à dire vrai, n’a même plus trop de sens. Les limites ont été atteintes. Alors que proposer ? Partir de la multitude et l’éclater par exemple, afin de créer des opportunités démultipliées, avec la mise en place de petits salons, de lieux de rencontre spatialisés sur les territoires pour conserver la diffusion du message. Il faut donner un sens différent à nos actions, d’autant que d’un point de vue sanitaire, nous ne pourrons plus jamais agir comme nous le faisions auparavant.
Cela pourrait aussi avoir pour vertu de revenir à une éthique, une mécanique plus saine. Aujourd’hui faire transiter un volume humain conséquent en un même lieu, au-delà de l’aspect sanitaire, remet en question le modèle écologique de l’événement. En revanche, si l’événement est décuplé et que les participants concernés peuvent se réunir à 10 dans un rayon de 2 km alentour, nous entrons dans une démarche plus responsable que de se mobiliser en train ou en avion pour atteindre la capitale ! De cet enjeu naît aussi la nécessité de se réinventer, en plus de ce besoin de réinvestir l’humain dans les événements. Profitons-en pour ancrer nos engagements ! Concevons et pensons des événements qui auront un impact vertueux, à la fois d’un point de vue écologique mais également sociétal. Nous n’avons plus le choix.
Cette crise nous y oblige. Il y a encore un an, nous en étions à imaginer faire « bientôt » des événements plus RSE, plus engagés, plus sains, plus responsables, sauf que la période désormais nous contraint. Finalement, la grande mutation que nous sommes en train de vivre accélère les questionnements qui nous animaient auparavant. Il y a une nouvelle vague d’événements qui arrivent ; les acteurs de la filière en sont même d’excellents représentants et avaient initié un pas en ce sens en amont de la crise sanitaire car les cahiers des charges évoluent déjà.
En chinois, le terme de « crises » est représenté par deux idéogrammes dont l’un signifie opportunité. Libre à chacun de considérer cela selon un prisme qui lui est propre : celui de la contrainte ou celui de l’opportunité. Notre société aujourd’hui ne peut plus s’enorgueillir d’événements grandioses qui poussent à l’énergie, au mouvement, à la consommation. Les agences événementielles vont avoir pour mission de mettre en place des cahiers des charges qui respecteront ces contraintes-là et qui créeront des espaces de rencontres vertueux. Les professionnels du secteur le disent souvent, l’événementiel ce n’est pas simplement créer un moment de rêve, c’est être dans l’organisation, être le garde-fou, le cadreur, celui qui lève les aléas pour que l’événement se produise.
Le travail de constat a été fourni, maintenant si nous raisonnons au futur et qu’on l’imagine positif, nécessairement l’humain en sortant de cette crise-là, autant le citoyen que le professionnel, va souhaiter recréer du lien, prendre contact, développer son réseau et donc à ce titre-là soyons profondément certains que l’événementiel en tant que vecteur de connexion humaine existera encore et toujours ! Oui, nécessairement différemment et en cela, la crise a aussi impacté le consommateur qui va chercher dans l’événement quelque chose de plus intime, profond, durable à la fois dans le temps et dans des dimensions sociétales et écologiques. On parle souvent du monde « d’après » qui est une injonction extrêmement complexe à appréhender et qui signifie de faire le deuil d’un monde « d’avant ». En revanche, le monde de demain nous encourage à prendre en compte plus que jamais les aspects juridiques, sanitaires, l’engagement RSE de l’entreprise dans ses valeurs.
Gardons à l’esprit que pour qu’il y ait communication, il doit y avoir un émetteur et un transmetteur et donc une rencontre. Nous avons connu le monde d’avant, nous l’avons apprécié et avec du recul chacun en a mesuré les dérives et déploré les abus. J’en suis persuadé, l’événementiel de demain sera sincère et responsable ; l’événement sera cette prise de parole fondamentale. La seule forme doit être redessinée avec intelligence mais la rencontre ne pourra jamais s’éteindre.
Mathieu BILLON Directeur national des programmes SUP’DE COM