Selon le classement exclusif The Good/NPA, Amélie Favre Guittet a été élue personnalité RSE la plus influente en 2024. Elle a fondé et préside Talent Management Groupe – certifié QUALIOPI –, qui comprend : Madircom, une agence de conseil RH et marque employeur, Pimp My Career, l’animation de cours dans plus une quarantaine d’écoles de commerce en France, Boost Me Up, une plateforme de coaching emploi pour les plus de 45 ans et PG Coaching, du coaching en développement personnel et professionnel. Son livre 30 pratiques RH pour valoriser les seniors en entreprise sortira aux éditions Vuibert début septembre 2024. Entretien.
The Good : Quelle est votre vision des ressources humaines en 2024 ?
Amélie Favre Guittet : En 2024, les ressources humaines continuent de se transformer pour répondre aux défis et aux opportunités d’un monde du travail en constante évolution.
J’y vois 5 grandes tendances qui doivent se développer ou, tout du moins, commencer à émerger :
1. Digitalisation et automatisation accrue :
- Utilisation de l’IA et du big data : Les RH tirent parti de l’intelligence artificielle (IA) et du big data pour améliorer le recrutement, la gestion des talents et les analyses prédictives. Ces technologies permettent d’identifier les besoins en compétences, de personnaliser les parcours de développement et de prédire les tendances du marché du travail. Il est crucial de ne pas oublier que la technologie ne doit pas remplacer l’humain, mais le compléter, et que l’investissement initial dans ces technologies peut être significatif.
- Automatisation des processus : De nombreux processus RH sont automatisés, libérant ainsi du temps pour les professionnels des RH afin qu’ils se concentrent sur des tâches à plus forte valeur ajoutée comme la gestion des talents et le développement stratégique. Je pense notamment à l’outil OAK RH qui permet d’accompagner les services RH dans la mobilité interne et le recrutement des salariés. Cela dit, l’automatisation doit être gérée avec précaution pour éviter la déshumanisation des interactions RH et garantir la sécurité des données.
2. Une vraie concentration sur l’Expérience Collaborateur (EC) :
- Bien-être et santé mentale : Le bien-être des équipes, y compris la santé mentale, est une priorité absolue. Les entreprises investissent dans des programmes de bien-être, des espaces de travail ergonomiques et des initiatives de soutien psychologique. Heureusement, on va bien au-delà de la salle de sport et du panier de fruits. (J’aborde d’ailleurs ce sujet dans ma newsletter Linkedin du 5 juin).
- Personnalisation de l’EC : Les parcours professionnels et les expériences des collaborateurs sont personnalisés pour répondre à leurs besoins et aspirations individuels. Cela inclut des plans de développement sur mesure, des horaires de travail flexibles et des opportunités de télétravail. Exigée par un grand nombre de GenZ, cette recherche de parcours pro personnalisée est désormais approuvée par les autres générations qui y voient leur intérêt ! Le risque étant, tout de même, une société de plus en plus individualiste. Un effet à double tranchant qu’il faudra suivre et tempéré en entreprise pour maintenir le collectif et l’engagement. Un autre aspect, dont il faut être conscient, est que la personnalisation doit être gérée de manière à éviter des coûts excessifs et à assurer une équité entre tous les salariés pour ne pas mettre en lumière un sentiment d’injustice et perdre tout le bénéfice de l’action.
3. Inclusion et diversité :
- Cultures inclusives : La diversité et l’inclusion ne sont plus seulement des mots à la mode, mais des éléments intégrés dans la culture d’entreprise. Les RH jouent un rôle crucial dans la promotion de politiques inclusives et dans la création d’environnements de travail équitables. À condition, bien sûr, que la Direction soutienne ces actions pour de vraies raisons et pas uniquement budgétaires.
- Mesure de l’Impact : Les entreprises mettent en place des indicateurs de performance pour mesurer l’impact des initiatives de diversité et d’inclusion, et ajustent leurs stratégies en fonction des résultats. Il est important de ne pas se perdre dans la bureaucratie et de s’assurer que ces initiatives apportent une réelle valeur ajoutée à l’organisation, ce qui, normalement, est tout l’intérêt d’une mesure d’impact !
4. Formation continue et développement des compétences :
- Culture Apprenante : Les entreprises encouragent une culture apprenante où les équipes sont incitées à développer continuellement leurs compétences. Cela inclut des formations régulières, des programmes de mentorat, des groupes de partage de connaissances et des plateformes d’apprentissage en ligne (LinkedIn Learning, Udemy, EdX…). À mon sens, le premier levier que toute entreprise devrait mettre en place !
- Adaptabilité et Polyvalence : Face à l’évolution rapide des technologies et des marchés, les compétences transférables et l’adaptabilité sont valorisées. Les RH doivent mettre en place des programmes pour aider les collaborateurs à acquérir ces compétences avant qu’il ne soit trop tard. Une vision projective des enjeux de l’entreprise est ici nécessaire, ainsi qu’une collaboration accrue entre le service Financier, le service RH et La Direction générale. Ce n’est pas sans nous faire penser à notre bonne vieille GPEC.
5. Responsabilité sociale et engagement environnemental :
- Engagement RSE : Les entreprises intègrent la Responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans leur stratégie RH. Les initiatives en matière de durabilité, de communauté et d’éthique sont renforcées, et les salariés sont encouragés à participer activement à ces efforts. Ce qui se fait à l’intérieur se verra à l’extérieur naturellement…
- Transparence et Éthique : Les pratiques RH (recrutement, salaires, onboarding, offboarding, gestion de la carrière) deviennent plus transparentes et éthiques, alignées avec les valeurs de l’entreprise et les attentes des collaborateurs et des parties prenantes.
The Good : Quels sont vos conseils aux DRH pour anticiper les évolutions du monde du travail ?
Amélie Favre Guittet : Pour anticiper les évolutions du monde du travail, il est essentiel de comprendre les grandes tendances à venir et d’adapter votre stratégie en conséquence. Cela inclut une veille régulière et une analyse des investissements pour rester compétitif tout en gérant les risques.
Encouragez l’innovation et la résilience. Créez des laboratoires d’idées, utilisez le crowdsourcing et formez les collaborateurs à s’adapter rapidement aux changements. Assurez-vous d’avoir des plans de continuité pour maintenir les opérations en cas de crise.
Investissez dans les compétences de demain avec des programmes de formation hybride et des reconversions professionnelles. Collaborez avec des écoles, des universités, des centres de formation pour développer des cursus adaptés à vos besoins, voire les développer en interne avec les collaborateurs qui souhaitent s’y impliquer.
Promouvez la diversité et l’inclusion de manière stratégique. Mesurez l’impact de vos initiatives avec des indicateurs de performance et formez vos leaders à un leadership inclusif. La diversité améliore les performances et l’innovation. C’est un fait, plus besoin de le prouver !
Enfin, adoptez des modèles de travail flexibles. Offrez des options de télétravail et des horaires flexibles pour attirer et retenir les talents de toutes les générations. Utilisez des outils de collaboration/digitaux et concentrez-vous sur les résultats plutôt que sur le temps de présence. Changement de paradigme, certes, mais gain d’engagement et de productivité !
Bref, pour réussir à anticiper les évolutions du monde du travail, il faut combiner innovation, flexibilité et performance économique tout en mettant l’accent sur la formation continue, la diversité et la résilience.