23/05/2022

Temps de lecture : 3 min

La fermentation, LA solution pour limiter l’impact environnemental de l’alimentation ?

En Europe comme aux Etats-Unis, une nouvelle génération de start-up lève des millions pour créer des alternatives à la viande, au lait et aux œufs, en s’appuyant sur des procédés de fermentation… Une technique prometteuse, avec de nombreux arguments écologiques à la clé.

En Europe comme aux Etats-Unis, une nouvelle génération de start-up lève des millions pour créer des alternatives à la viande, au lait et aux œufs, en s’appuyant sur des procédés de fermentation… Une technique prometteuse, avec de nombreux arguments écologiques à la clé.

La fermentation est une pratique ancienne et éprouvée à travers le monde : fromages, yaourts, alcool, mais aussi tempeh, tofu ou kimchi reposent sur cette technique. Désormais, la fermentation est également utilisée par des startups industrielles pour produire des protéines alternatives, via un processus complexe de “fermentation de précision”, reposant sur la programmation de micro-organismes…

Des protéines de lait… qui n’ont jamais vu de vache

Aux Etats-Unis, Perfect Day – qui a levé 710 millions de dollars, notamment auprès de Leonardo DiCaprio – fabrique par exemple déjà des protéines de lactosérum d’origine non animale. “Nous modifions des microbes pour qu’ils produisent la protéine qui nous intéresse, le lactoserum en l’occurrence. Nous cultivons ces microflores en leur apportant des vitamines, des minéraux et tout ce dont elles ont besoin pour se développer. Le produit final est une protéine de lactosérum très pure, de couleur blanche”, expliquait​​Angela Braren, la Head of New Ventures de l’entreprise, lors du festival SXSW.

Résultat ? “Nous fabriquons des protéines de lait qui sont moléculairement identiques à ce que vous trouvez dans les protéines bovines. Nous avons déjà des produits en magasins – des crèmes glacées, du fromage frais, du lait… Ce n’est pas un fantasme, c’est bien réel. C’est une technologie qui est utilisée pendant des décennies pour produire des produits comme l’acide citrique ou la présure.” Avec ce procédé, Perfect Day annonce une réduction jusqu’à 97 % d’émissions de gaz à effet de serre par rapport à la production laitière conventionnelle.

Si les coûts de production sont encore élevés, ils devraient baisser rapidement à mesure que cette industrie naissante monte en puissance. “L’une de nos priorités est d’arriver à des coûts de production identiques aux protéines conventionnelles. Mais nous n’arrêterons pas là : le but est d’être moins cher.”

Ni plante, ni animal

Un concurrent de Perfect Day, Nature’s Fynd s’appuie, lui, sur des recherches menées par la NASA et un champignon fermenté, utilisé pour créer des galettes sans viande et du fromage frais sans lait. Depuis le printemps 2022, ses produits sont commercialisés chez Whole Foods, l’enseigne de supermarché d’Amazon. “Nous avons découvert un micro-organisme dans le parc du Yellowstone : ce n’est ni une plante, ni un animal, mais un champignon. Il est très intéressant, car il contient 50% de protéines”, explique le Français Thomas Jonas, CEO et cofondateur de Nature’s Fynd.

Parmi les arguments affichés par cette startup basée à Chicago, capitale américaine de la viande : 5,4 fois plus de protéines produites par hectare de terre cultivée que les protéines animales et 1,3 fois plus que les protéines végétales, ou encore 99% d’eau consommée en moins ! Pour les consommateurs, ces protéines issues de la fermentation sont aussi très faciles à intégrer dans un régime alimentaire, sans avoir à changer ses habitudes.

De plus, comme ils sont cultivés en usine, ces aliments ne sont pas dépendants de la météo ou des saisons : ils peuvent être produits tout au long de l’année, y compris au cœur des villes, ce qui limite les flux logistiques et la pollution associée. “Nous pouvons cultiver nos protéines 365 jours par an, qu’il pleuve ou qu’il vente. Et nous le faisons à 10 minutes du centre-ville de Chicago : on pourrait dupliquer cet outil de production partout dans le monde”, ajoute Thomas Jonas.

En Europe aussi !

Les startups américaines ne sont pas les seules à s’intéresser au sujet : en Allemagne, Formo a levé 54,3 millions de dollars, en Suède Mycorena a levé 1,8M€, aux Pays-Bas Protein Brewery a levé 22 millions d’euros et en Grande-Bretagne, Enough, 78,1 millions de dollars. En France, c’est Bon Vivant qui fait figure de pionnier, avec une levée de fonds de 4 millions d’euros en mars 2022 pour développer des protéines de lait.

Le suisse Planetary, lui, a récemment levé 8 millions de dollars, mais avec un positionnement différent : il met à disposition des capacités industrielles à disposition des produits issus de la fermentation. Un créneau sur lequel est aussi positionné le brasseur AB-Inbev, avec sa filiale Biobrew : spécialiste de longue date de la fermentation – dans le cadre de la production de bière – il entend bien avoir son mot à dire sur ce sujet décidément porteur… En effet, d’après le BCG, d’ici à 2030, 10 à 20% de la viande, des œufs, des produits laitiers et des fruits de mer consommés dans le monde seront des substituts alternatifs.

Mais les promesses de la fermentation ne s’arrêtent pas à l’alimentation, comme l’explique Angela Braren : “nous pouvons aller au-delà de l’agro-alimentaire : la cosmétique et la pharmacie sont aussi très intéressées par ce que nous faisons.” La révolution de la fermentation ne fait que commencer.

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