The Good : En partant de votre raison d’être Viva la différence, pouvez-vous rappeler les grandes lignes de votre stratégie RSE ?
Agathe Bousquet : « Viva la différence » est plus qu’un motto pour clamer notre singularité française à l’international : c’est à la fois la raison d’être du groupe et notre conviction profonde. Nous croyons en « la différence » des idées, des concepts créatifs et des stratégies de communication. Cela signifie aussi « Viva » le respect des différences au sein de la société et le vivre ensemble en harmonie. Ces valeurs infusent tel l’optimisme communicatif auprès de nos équipes, nos clients et la société en général. Elles se retrouvent aussi bien via nos campagnes, que dans une inititiative comme Working With Cancer ou encore, le Women’s Forum.
Caroline Darmon : Notre responsabilité, en tant que leader français du marketing, de la communication et de la transformation digitale des entreprises, nous a amenés à concevoir le programme No Impact For Big Impact. NIBI a permis de former à la communication responsable plus de 3000 collaboratrices et collaborateurs en France, plus de 800 clients et d’embarquer une vingtaine d’entreprises concrètement avec nous, dans l’éco-socio-communication de leurs projets. Nous accompagnons à la fois nos clients en marketing responsable et sur des actions permettant d’accélérer leur transformation. Un résultat notamment incarné dans le fait que Publicis France conforte chaque année sa place de 1er réseau d’agences au Label RSE Agences Actives (AACC et AFNOR Certification).
The Good : Pour aller plus loin, les équipes RSE et les équipes Talents ont imaginé ensemble La Positive – Acte 1, une journée organisée en mars 2024. Quel était l’objectif ?
Agathe Bousquet : La pression de la société est de plus en plus forte. Les dérèglements climatiques de plus en plus visibles. Les réglementations ESG de plus en plus exigeantes. Parallèlement, le paysage technologique évolue à une vitesse sans précédent. Cette journée ouverte aux 5 000 collaborateurs et collaboratrices leur a permis de rester à la pointe dans les différents domaines de la communication responsable. Il s’agissait de faire de la formation continue pour les pionniers et de sensibiliser ceux qui l’étaient moins. Toutes les verticales métiers étaient représentées avec des Master Classes dédiées : Création & Stratégie, Influence, Production, Numérique, Media, Évènementiel. L’événement a été un gros succès et nous a donné envie de faire l’Acte 2 ! C’est important de lever le stylo pour prendre du recul et s’inspirer.
The Good : Quelle est la singularité de La Positive – Acte 2 qui a eu lieu le 3 octobre dernier ?
Agathe Bousquet : Nous l’avons souhaitée encore plus inspirante et plus concrète. Des binômes annonceur / agence sont venus partager leurs bonnes pratiques dans différents domaines : écrire les nouveaux récits et imaginaires collectifs, engager ses consommateurs et consommatrices, privilégier l’éco-design, accompagner des entrepreneurs à impact positif, représenter la diversité plus et mieux, influencer pour faire évoluer les mentalités, avoir une stratégie Media responsable et une démarche d’éco-socio-production, faire de l’innovation durable (produit, service, événementiel…). Nous avons également montré de nombreux « uses cases » positifs en vidéo. Et puis, bien entendu, c’est indispensable de s’appliquer à soi-même ce que nous montrons. C’est pour cela que La Positive s’inscrit dans une démarche d’éco-socio conception événementielle LEAD, le Label Événement à Ambition Durable. La Positive – Acte 1 avait obtenu le LEAD OR. On croise les doigts pour cette nouvelle édition.
Caroline Darmon : Nous avions aussi à cœur de partager le travail de celles et ceux qui nous aident à devenir plus responsables, nos partenaires solutions. Certains rendent les campagnes et les productions audiovisuelles plus inclusives (singularist, Heralbony, Séquences clés), plus écologiques et circulaires (La Ressourcerie du Cinéma, RESSAC, Bilum). D’autres s’attellent plus spécifiquement à la décarbonation des contenus (Scope 3, Vidmizer, GreenEncoder). Bien entendu, tous n’ont pas pu être représentés, mais nous croyons en la vertu de la capillarité. Nous le constatons, il est essentiel d’embarquer les achats dans ce chemin de la « sustainability ».
The Good : La Positive est-elle aussi une façon de montrer que responsabilité rime avec opportunité et créativité ?
Caroline Darmon : Absolument !Plus on souhaite communiquer sur des enjeux de responsabilité, plus on a le devoir d’être créatif. Nous voulons faire de la pédagogie enthousiasmante, susciter l’envie d’avoir de meilleures représentations de la Diversité et l’Équité, créer le désir de consommer moins et mieux, etc. Pour y parvenir, exit le ton « boring », anxiogène ou donneur de leçon ! La Positive prouve que le mariage entre créativité et responsabilité est définitivement consommé. Prenons le cas de la campagne « La transition énergétique est en marche, ENGIE y contribue chaque jour ». Elle a mis de côté la mise en scène des infrastructures ENGIE, au profit d’une représentation plus poétique de la transition.
Agathe Bousquet : Le temps des campagnes moralisatrices et culpabilisantes est très loin. Parmi nos cas positifs et inspirants, un nombre conséquent a été récompensé aux Cannes Lions 2024 : Renault – Cars To Work et Plug Inn for Business, ORANGE – Women’s Football, Darty – Long-Lasting Reviews, ou le portrait d’Aya Nakamura : Haut Niveau, produit par Lancôme. C’est toujours un marqueur important d’avoir un impact créatif, avec cette reconnaissance pour les agences. Notre expression « No Impact for Big Impact » prend tout son sens. Ce qui est important maintenant, c’est de passer à l’échelle pour que l’éco-socio-conception et production de toutes les campagnes deviennent la norme.
The Good : Marco Venturelli, Président en charge de la création de Publicis France, évoque l’ère du post-purpose. Quel regard portez-vous sur ce phénomène ?
Agathe Bousquet : En effet, au dernier festival des Cannes Lions, Marco Venturelli a évoqué le « purpose » qui se retrouve au cœur du business des marques. La tendance aux « purposes fashionables » – des campagnes où les annonceurs communiquaient sur de grandes causes décorrélées de leurs activités, est passée de mode. Aujourd’hui, les marques mettent sur le marché des produits et des services plus alignés avec leurs engagements sociétaux.
Caroline Darmon : C’est le cas de nombreux exemples montrés lors de La Positive. De « Cars to work » de Renault sur la mobilité inclusive, à la solution cleantech innovante « EnergySage.fr » deSCHNEIDER ELECTRIC, en passant par de jeunes entreprises à impact, comme OMNI qui démocratise la trottinette en fauteuil roulant, ou bien la marque française de sneakers durables, Iné.
The Good : Les objectifs RSE de Publicis France sont très ambitieux. Quels sont vos principaux outils et solutions pour les atteindre ?
Agathe Bousquet : Nous avons développé un certain nombre d’outils propriétaires, comme A.L.I.C.E. Advertising Limiting Impacts & Carbon Emissions – conçu par le département RSE de Publicis Groupe, avec Bureau Veritas pour réduire l’impact carbone de toutes nos actions de communication (production, media, digital, événementiel, datas…). De plus, nous étions au cœur de la réflexion du gouvernement sur les Contrats-climat (prévus par la loi Climat et Résilience) pour favoriser des pratiques plus responsables en matière de communications commerciales. On peut aussi citer le Razoscan qui mesure l’empreinte environnementale de nos sites web. Basé sur l’algorithme EcoIndex, il a été mis au point par Razorfish, en partenariat avec le collectif d’experts indépendants GreenIT. Avec notre partenaire Imagine 2050, nous avons participé à la création d’un MOOC pour nourrir les nouveaux récits et imaginaires désirables, compatibles avec les limites planétaires. Et de nombreuses choses encore !
Caroline Darmon : Et puis, il y a aussi l’Intelligence Artificielle qui est désormais un outil pour appuyer la communication responsable. Avec un questionnement systématique quand on utilise l’IA dans nos métiers : gardons en tête que les bénéfices de l’outil développé doivent être supérieurs à son impact environnemental et sociétal. Nous sommes partis des questionnements des équipes : comment mieux représenter la Diversité, l’Équité et l’Inclusion ? Comment mettre en avant les comportements éco-responsables dans les actions de communication ? Comment lutter contre le greenwashing ? À partir de ces besoins, appuyés par lecadre des règles de déontologie de l’ARPP, très exigeantes en matière de développement durable, nous avons lancé IA Anti-greenwashing. Cet outil d’auto-évaluation est ouvert à tous les collaborateurs Publicis dans le monde et nous permet d’être plus efficaces pour lutter contre le greenwashing.
The Good : Comment faites-vous bouger les lignes du secteur des agences média ?
Agathe Bousquet : Dans l’imaginaire collectif, le plus gros de l’impact carbone des campagnes de pub, c’est le tournage, alors que c’est la diffusion ! La décarbonation est essentielle, mais nous prenons en compte toutes les dimensions : les problématiques de représentations sociales, l’enjeu de la qualité des contenus, le pluralisme et la diversité des médias, la lutte contre la désinformation – des questions hautement démocratiques, ou encore la data privacy et l’éthique de l’IA. Il ne faut pas oublier que l’écosystème médiatique est fortement dépendant des recettes publicitaires. Pour une marque, c’est donc important de se demander : à quels types de contenus contribue notre investissement ?
Caroline Darmon : C’est dans ce sens que Publicis Media accompagne ses clients en les aidant à considérer toutes les dimensions de la responsabilité pour construire des stratégies personnalisées de mediaplanning éclairé. Publics Media a lancé Positive Media Project, dès 2020. Entre le think tank et le fab lab, il rassemble des annonceurs, des régies et des agences autour de conférences et d’ateliers pour réfléchir et co-construire des solutions publicitaires plus responsables. La première année a été très orientée sur l’empreinte carbone, qui reste la première étape généralement. La Française des Jeux a été pionnière en tant que client et participant actif. Nous étions donc ravis que la FDJ vienne nous présenter son parcours à La Positive. Nous avons aussi accueilli Heineken sur scène, qui a partagé sa méthode pour aller au-delà du carbone, indispensable aujourd’hui pour parler de performance responsable.
The Good : Le mot positif de la fin ?
Caroline Darmon : Assumons d’être utopistes et espérons qu’à l’avenir, on oubliera le mot « responsable » pour que ces pratiques pionnières soient naturellement intégrées dans tous les domaines de la communication.