15/04/2025

Temps de lecture : 3 min

« L’art est un outil d’émancipation, de cohésion et de transformation », Frédéric Jousset (Art Explora)

Né en 1970, Frédéric Jousset est un entrepreneur et mécène qui conjugue avec audace performance économique et engagement culturel. Diplômé d’HEC, il débute chez L’Oréal avant de cofonder Webhelp en 2000, devenue en deux décennies un géant mondial de l’expérience client.

En parallèle, il s’investit pleinement dans la promotion de la culture : en tant que président du Conseil d’administration de l’Ecole nationale des Beaux Arts de Paris, puis comme propriétaire et président de Beaux Arts Magazine, administrateur du Louvre, ou encore président du centre d’art Hangar Y. C’est en 2019 qu’il crée le fonds philanthropique Art Explora avec une ambition claire : rendre la culture accessible au plus grand nombre. Ce passionné d’entrepreneuriat a par ailleurs investit majoritairement dans différentes sociétés : SMAC, fournisseur haut de gamme de services de toiture, d’isolation et de bardage pour les bâtiments et l’hôtel de luxe Relais de Chambord. Rencontre avec un hyperactif au grand coeur.

The Good : Frédéric, qu’est-ce qui vous a poussé à faire de la culture un véritable engagement de vie ?


Frédéric Jousset : Tout est parti d’une passion familiale très forte. Ma mère était conservatrice en chef à Beaubourg, mon père entrepreneur et mélomane engagé. Dès l’enfance, j’ai été immergé dans les musées, les concerts, les châteaux… C’est une passion qui ne m’a jamais quitté, même si je l’ai un temps mise en veille durant mes premières années en entreprise.

Quand Webhelp a commencé à marcher, je suis devenu mécène du Louvre. C’est là que tout a basculé : j’ai rencontré des personnalités du monde de l’art, j’ai rejoint le conseil d’administration des Beaux-Arts de Paris, j’ai racheté Beaux Arts Magazine, j’ai participé à la définition du Pass Culture… Et en 2019, au sommet de l’Everest, j’ai eu une prise de conscience profonde : consacrer mon énergie à réduire la fracture culturelle. C’est la naissance d’Art Explora.

The Good : Vous avez structuré votre engagement autour de deux entités, pouvez-vous nous les présenter ?


Frédéric Jousset : Oui. ArtNova est un fonds d’investissement à visée lucrative. Une part de ses gains finance Art Explora, une fondation reconnue d’utilité publique. L’objectif est simple : faire rayonner la culture au-delà des cercles initiés, dans tous les territoires.

The Good : Quels types de projets soutenez-vous concrètement ?


Frédéric Jousset : Nous avons plusieurs leviers. D’abord, le Prix européen Art Explora – Académie des beaux-arts : 170 000 € remis chaque année à des institutions européennes qui innovent pour aller à la rencontre de nouveaux publics. On parle ici de musées, de petites associations, de projets hors-les-murs.

Ensuite, nous avons lancé les camions musées en partenariat avec de grandes institutions comme le Centre Pompidou. Ces expositions mobiles sillonnent les campagnes, les quartiers prioritaires, pour toucher principalement les scolaires.

Et puis, il y a le bateau-musée, qui fait escale autour de la Méditerranée : Venise, Tanger, Rabat, Limassol, etc. Chaque escale est un événement culturel en soi, avec jusqu’à 10 000 visiteurs par jour.

Enfin, nous développons des résidences d’artistes de haut niveau, en France et bientôt en Albanie. Chaque artiste reçoit un budget de résidence et de production. L’idée : soutenir des créations à fort impact sociétal ou environnemental.

The Good : Vous défendez l’idée d’une culture qui transforme. Pourquoi ?


Frédéric Jousset : Parce que l’art libère, forme à un jugement autonome, crée un langage commun, et agit comme un ascenseur social. Il permet à chacun de mieux s’exprimer, de mieux comprendre le monde et d’y trouver sa place.

Je plaide d’ailleurs pour ajouter un « C » à la RSE, pour RSCE – Responsabilité Sociétale, Culturelle et Environnementale. La culture doit être considérée comme une brique essentielle des engagements des entreprises. Elle touche à l’émotion, et l’émotion est souvent le déclencheur du changement.

The Good : Comment évaluez-vous l’impact de vos actions sur le terrain ?


Frédéric Jousset : D’abord par les chiffres : en 2023, 350 000 personnes ont été touchées par nos dispositifs pendant au moins une heure. Parmi elles, plus de 30 % n’avaient pas vécu d’expérience culturelle depuis plus d’un an. Et 60 % déclarent vouloir revenir, accompagnés.

Mais au-delà des chiffres, il y a les retours humains, les sourires d’enfants dans les camions musées, les échanges intergénérationnels lors d’ateliers, les habitants qui accueillent chez eux une œuvre d’art pour la première fois. C’est là que le sens opère.

The Good : Des projets à venir pour 2025 ?


Frédéric Jousset : De nouvelles escales pour le bateau musée, de nouveaux camions-musées en construction, le développement des résidences artistiques et toujours cette volonté de faire rayonner la culture dans les territoires les plus éloignés des grands centres !

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Crédits photo : FRANCOIS ROELANTS

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