09/11/2020

Temps de lecture : 3 min

Le “nanotourisme”, un nouveau mode de voyage pour demain ?

Chaque année la Design Week de Vienne investit un nouveau quartier de la capitale autrichienne dans le but de le faire découvrir au plus grand nombre. Pour l’édition 2020, d’envergure réduite en raison de la crise sanitaire, c’est Medling, un arrondissement populaire au sud-ouest de la ville qui a été choisi : cet environnement servait de cadre à une expérimentation autour du “nanotourisme”... Mais que se cache-t'il derrière ce concept, qui cherche à proposer une vision différente du tourisme ?

Chaque année la Design Week de Vienne investit un nouveau quartier de la capitale autrichienne dans le but de le faire découvrir au plus grand nombre. Pour l’édition 2020, d’envergure réduite en raison de la crise sanitaire, c’est Medling, un arrondissement populaire au sud-ouest de la ville qui a été choisi : cet environnement servait de cadre à une expérimentation autour du “nanotourisme”… Mais que se cache-t’il derrière ce concept, qui cherche à proposer une vision différente du tourisme ?

Initié par l’Architectural Association School of Architecture de Londres, le projet “AA nanotourism Visiting School” a vu le jour dès 2014, dans l’objectif de promouvoir une version ultra-locale et participative du tourisme, plus bénéfique pour la planète et la société que le tourisme traditionnel. Une démarche qui entre en résonance avec la crise sanitaire… “La Covid a renforcé la nécessité de développer des formes plus locales de tourisme, alors que traditionnellement, l’état d’esprit du secteur est plutôt de s’approprier les cultures locales et la nature pour répondre aux attentes des visiteurs qui payent pour cela”, explique ainsi Jakob Travnik, architecte viennois et membre du collectif. 

A Vienne, comme dans plusieurs villes à travers le monde, le collectif développe des projets pilotes de “nanotourisme”, en impliquant les habitants dans le cadre d’un processus participatif. “Le nanotourisme va au-delà du tourisme : il s’agit surtout d’un état d’esprit qui vise à améliorer l’environnement quotidien et à ouvrir de nouvelles opportunités pour les économies locales”, précise Aljosa Dekleva, l’architecte slovène à l’origine du concept de nanotourisme et de l’école qui lui est dédiée.

Fin septembre 2020, en amont de la Design Week de Vienne, cette école originale a donc posé ses valises à Meidling. Les différents groupes d’étudiants impliqués ont eu pour objectif d’explorer le quartier et de partir à la rencontre de ses habitants afin d’identifier des opportunités d’expériences de “nanotourisme”, qu’ils ont ensuite concrétisées par une série de projets pilotes.

En étudiant l’histoire de Medling, nous avons remarqué que l’eau y jouait un rôle essentiel : au fil du temps, des sources thermales y ont souvent été découvertes, exploitées, puis oubliées. C’est une part importante de l’identité du quartier”, explique par exemple Alex Gahr, qui a participé au projet “Urban Spa“, un parcours urbain à la recherche des sources d’eau chaude enfouies dans le quartier, connues et exploitées de longue date mais désormais totalement disparues. 

Parmi les autres projets imaginés dans le cadre de la Vienna Design Week 2020 figurent un cheminement à la rencontre des habitants du quartier pour les écouter raconter leurs passions ou l’édition d’un guide pour permettre à chacun – visiteurs comme habitants de Vienne – d’exercer l’un de ses droits souvent méconnu : celui de tenir son propre stand sur l’un des marchés de la ville, jusqu’à trois jours par an. “Le nanotourisme est une forme d’apprentissage. Les différents projets menés tournent autour de la découverte et de la transmission, pour donner une nouvelle valeur aux connaissances existantes. C’est par l’expérimentation que nous pourrons imaginer de nouveaux modèles”, explique Aljosa Dekleva.

Derrière le caractère parfois anecdotique des travaux menés pendant l’événement, transparaissent les valeurs et les objectifs du nanotourisme : reconnecter les individus à leur environnement en les invitant à porter un nouveau regard sur ce qui les entoure, susciter des interactions inédites entre visiteurs et habitants, révéler des histoires enfouies… “Cette période est une occasion unique d’explorer de nouveaux modes de voyage. Cette situation nous invite à réfléchir et redécouvrir ce qui est important dans nos vies et ouvre la porte à de nouveaux types d’expériences”, résume Aljosa Dekleva.

Avant Vienne, la AA nanotourism Visiting School avait déjà posé ses valises à Vitanje en Slovénie, Cusco au Pérou ou Honolulu, à Hawaï. Plus proche de nous, elle s’était installée dans la cité balnéaire d’Ault, en Picardie, au printemps 2017. Objectif : étudier les nouvelles possibilités touristiques de ce village qui a connu son heure de gloire dans les années folles, avec ses casinos et ses établissements de bain, avant de tomber dans l’oubli au profit d’autres destinations plus exotiques.

Dans la foulée des travaux des étudiants-architectes mobilisés à Ault, plusieurs initiatives bien concrètes ont perduré sur place : la réouverture du phare au public, fermé depuis 1984, ou encore la constitution d’un fonds de documentation sur l’urbanisme et le paysage local, grâce aux témoignages, photos, documents, films amateurs et cartes postales fournies par les habitants. L’approche du “nanotourisme” est donc avant tout un moyen de réveiller les mémoires et d’encourager le développement d’initiatives locales, pour un tourisme plus respectueux de l’environnement et des gens. Dans un contexte de crise sanitaire, avec une limitation des voyages au long court, l’approche est plus que jamais d’actualité. 

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