L’événement a ceci de particulier qu’il est également un média qui peut acculturer ceux et celles qui y participent à un sujet d’actualité. C’est notamment le cas, et de plus en plus, pour la transition écologique. Explications.
L’événementiel est en train de vivre une véritable révolution verte. Agences, organisateurs et exposants modifient leurs pratiques, encouragés en cela par un cadre réglementaire de plus en plus contraignant. Désormais, la réduction de l’impact est un élément à part entière des propositions, et est même déterminante pour valoriser un projet. À l’heure où la crise climatique est devenue la première source d’inquiétude des Français, comme en atteste désormais la quasi-totalité des instituts de sondage, de plus en plus de festivals, de salons, de foires, de séminaires, de colloques, de congrès et de conférences adoptent un fonctionnement écoresponsable, développant le recyclage des déchets, réduisant leur consommation énergétique, limitant le gaspillage alimentaire, favorisant le recours aux mobilités douces, pivotant ainsi vers l’économie circulaire tout en améliorant leur bilan carbone.
Par ricochet, ces différentes manifestations, qu’elles soient professionnelles, sportives ou culturelles, peuvent également être les vecteurs d’un véritable changement. Avec à son actif 1 200 foires et salons, 3 000 congrès, et 380 000 événements d’entreprises organisés en moyenne tous les ans, qui réunissent plusieurs dizaines de millions de participants, le secteur a indéniablement un rôle à jouer pour acculturer visiteurs et professionnels à la protection de l’environnement et sensibiliser à la transition écologique. Quels sont ses atouts pour y parvenir ?
Leviers pédagogiques
Depuis quelques années, les événements qui ont pour vocation d’accélérer la prise de conscience écologique, et d’inciter le grand public, les acteurs économiques et les décideurs politiques à passer à l’action, deviennent plus nombreux. Véritables démonstrateurs des bonnes pratiques environnementales, ils permettent aux participants de rentrer au cœur du sujet en leur faisant vivre une expérience pratique qui ne se limite pas à la théorie. Il s’agit de vivre la transition et pas seulement d’en entendre parler, comme l’explique Dan-Antoine Blanc-Shapira, fondateur de l’agence Sensation ! : « L’événementiel permet de plonger les publics au cœur d’une démarche écoresponsable : ils verront « de leurs propres yeux » les efforts en matière d’optimisation des transports et de maîtrise de l’énergie, ils toucheront de leurs mains les matériaux écoresponsables, ils participeront à la réduction et au tri sélectif des déchets, ils goûteront les produits bios et de saison, pourront constater la récupération des surplus alimentaires, etc. L’événement ne se contente pas de « transmettre » un message, il favorise son appropriation. »
Afin de pousser le curseur un cran plus loin, le Réseau éco-événement (REEVE) a conçu la Fresque de l’Événementiel, pensée sur le même modèle que la Fresque du Climat et que la Fresque du Numérique, un atelier qui s’adresse à l’ensemble des professionnels du secteur, et qui a pour vocation de former à la relation entre événementiel, dérèglement climatique et enjeux RSE dans une approche collective. Cet outil permet de mieux faire comprendre les impacts environnementaux des événements, mais aussi de fournir des pistes pour « entrer en transition écologique. »
Faire progresser la sensibilisation des agences, des organisateurs, des exposants et des prestataires est une étape essentielle, car en bénéficiant d’une meilleure compréhension des enjeux et d’une meilleure connaissance des leviers à actionner, ceux-ci pourront mieux les expliquer et mieux les mettre en pratique.
Accélérateurs du changement
Autre évolution notable, le spectre des thématiques abordées est désormais plus large, ne se limitant plus simplement à la décarbonation. La sauvegarde de la biodiversité, le tri et le recyclage des déchets, le commerce équitable, l’agriculture biologique, la protection des océans, la sobriété numérique font l’objet de manifestations spécifiques, embrassant tous les aspects de la transition. Par ailleurs, pour changer la donne, le secteur peut aussi s’appuyer sur des contenus plus innovants et plus impactants, comme le précise Nicolas Turpin, fondateur et président de l’agence Eko, spécialisée dans l’événement durable : « Il faut réussir, à la fois, à acculturer pour comprendre les transitions environnementales en cours, avec par exemple des prises de paroles inspirantes faites par des scientifiques, mais aussi réveiller les esprits avec des actions plus percutantes, comme du team building solidaire, une rupture dans le mode de consommation d’un événement, un challenge interne. »
Pour accélérer le changement, il faut favoriser par les prises de conscience, mais aussi faire connaître les projets les plus game changers. Dans cette optique, le salon Zéro +, organisé au parc des expositions de la Porte de Versailles, réunit une centaine d’exposants qui sont à la disposition des entreprises pour échanger sur les thématiques du recyclage et de l’économie circulaire. Même son de cloche avec ChangeNow au Grand Palais éphémère, qualifié de plus grand événement des solutions pour la planète, qui « réunit chaque année un large panel d’intervenants prestigieux du monde entier pour partager les innovations et les solutions qui nous permettront de relever le défi du dérèglement climatique ».
C’est également la raison d’être de la Semaine européenne du développement durable, dont l’objectif est de mettre en avant les initiatives individuelles et collectives portées par les citoyens, les associations, les écoles, les collectivités, et les entreprises par le biais de nombreuses manifestations. Le but est d’accélérer la transition écologique en partageant des actions concrètes et utiles, que chacun peut s’approprier. En 2022, ce sont ainsi 1 321 événements européens, dont 172 français, qui ont eu lieu pour présenter plus de 7 000 projets. Dans la même dynamique, la Semaine européenne de réduction des déchets, coordonnée en France par l’ADEME, l’Agence de la transition écologique, vise à promouvoir les pratiques circulaires en expliquant comment consommer de façon durable et comment recycler pour prolonger la durée de vie des produits. En 2022, elle a été à l’origine de 6 365 actions de réemploi. Un véritable booster de l’économie circulaire.
Tout ceci ne constitue cependant qu’un début. Dans les années qui viennent, à mesure que l’impact du réchauffement climatique deviendra plus concret, le secteur pourrait devenir un élément central de la transition écologique. « L’événementiel a un rôle phénoménal à jouer dans un avenir très proche pour embarquer nos publics vers une société moins carbonée et respectueuse des écosystèmes. Nous avons l’obligation d’agir à la fois sur le temps court, l’urgence climatique, mais aussi sur le temps long, la conduite du changement. »,conclut Nicolas Turpin.
Cet article est tiré du Trend Book 2024 – Quand l’éphémère devient durable