Lauréat de notre Grand Prix de la Good Économie 2021 dans la catégorie “Préserver une santé durable”, Les Opticiens Mobiles s’engagent et développent une nouvelle vision du métier, plus humaine et plus experte. The Good interroge le fondateur du réseau, Matthieu Gerber, pour qu’il nous explique comment son entreprise continue sa transformation positive.
The Good : Pourquoi avoir candidaté au Grand Prix de la Good Économie 2021 ?
Matthieu Gerber : J’ai candidaté au Grand Prix de la Good Économie pour mettre en avant les actions de nos équipes qui effectuent au quotidien un travail utile pour permettre aux patients d’accéder facilement à la santé visuelle sur tout le territoire et leur éviter le non-recours aux soins. Nous permettons aux opticiens d’agir et d’être reconnus comme des professionnels de santé au service des personnes qui ont besoin de mieux voir. Nous avons redoré l’image du métier en répondant aux besoins muets et insatisfaits des personnes en perte d’autonomie. Il y a un peu plus d’un million de personnes âgées dépendantes à domicile dans toutes les zones, qu’elles soient urbaines, périurbaines et rurales, qui n’ont pas accès à la santé visuelle. Il y a également 600 000 personnes qui vivent en EHPAD et 500 000 personnes dans des structures prenant en charge le handicap. L’opticien est un professionnel de santé avant tout, en lien avec l’ophtalmologiste. Nous avons donc participé au Grand Prix puisque nous apportons un service à des personnes en difficulté dans une dynamique de « l’aller vers ». Nous avons également créé un nouveau métier pour l’opticien lui permettant d’exercer pleinement son rôle de professionnel de santé : l’opticien coordonnateur en santé visuelle. C’était naturel pour nous de le faire !
TG : Quels sont les champs de l’impact concernés ?
M.G : L’entreprise dès le début a été créée pour avoir un impact positif répondant à des besoins omniprésents. On a créé un service s’adressant aux publics fragiles, avec des prix accessibles et un métier valorisant pour le professionnel de santé qu’est l’opticien. Nous publions chaque année depuis 2018, un rapport d’impact dans lequel nous analysons huit critères : l’éthique des affaires, l’impact, le volet social pour nos opticiens partenaires, le volet social pour l’ensemble de nos équipes support et opticiens salariés, le volet social pour nos bénéficiaires et les aidants, la satisfaction et la sensibilisation du public.
TG : Quel chemin de transformation RSE avez-vous entrepris depuis au sein de votre entreprise ?
M.G : Avec nos équipes, nous essayons au maximum de contribuer positivement sur l’environnement, sur la filière, etc… Nous sommes par exemple en train de lancer notre propre collection de paires de lunettes complètement biosourcées conçues dans une usine jurassienne qui a la certification Origine France Garantie. Nous avons également supprimé des imprimantes pour réduire notre consommation de papier qui plus est entièrement issu de forêts écoresponsables. Nous avons mis en place une flotte de véhicules hybrides ainsi que le tri-sélectif. Du côté de la logistique, nous faisons des regroupements de commandes pour éviter trop d’envoi de colis. Nous avons mis en place une plateforme “avis vérifié” pour récolter des avis clients afin d’avoir une transparence totale sur la qualité de notre service pour se remettre en question le cas échéant. Nous prenons des décisions collectives sur le bien-vivre ensemble au sein des bureaux avec une équipe “happy at work”. Nous avons créé un groupe d’agitateurs de valeurs pour décliner et faire vivre nos quatre valeurs (innovation, engagement, proximité et dépassement) au sein de nos équipes et notre réseau d’opticiens mobiles. Quels sont les comportements attendus par chaque collaborateur derrière ces valeurs-là ? Quel comportement dois-je avoir au quotidien pour respecter ces valeurs collectives ? Nous sommes aussi, de manière statutaire, société à mission depuis décembre 2021 et nous sommes en cours d’obtention de l’agrément ESUS (Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale). Enfin, nous visons à devenir B Corp.
TG : Pouvez-vous nous partager quelques-uns de vos indicateurs ?
M.G : Nous avons mis en place plusieurs indicateurs comme l’échelle des salaires, le nombre de CDI, le nombre de femmes dans les équipes. Par exemple, notre comité de direction est composé à 48% de femmes. Nous suivons aussi des critères ESG. Pendant les entretiens annuels, chaque collaborateur transmet ses sources de motivation au nombre de sept permettant de voir si ce dernier est satisfait ou non. Est-ce que les sources de motivation que j’ai en arrivant dans l’entreprise tiennent dans le temps ? L’entreprise doit continuer d’évoluer avec les sources de motivation premières des personnes qui la composent. Nous suivons donc le pourcentage de satisfaction exprimée par l’ensemble de nos équipes. Nous essayons aussi toujours d’être moins cher que les prix moyens du marché : nos prix sont en moyenne 9% moins chers que la moyenne du marché. Nous regardons aussi le nombre d’alertes maltraitance que nous signalons. Nos opticiens, quand ils interviennent à domicile ou ailleurs, ont des numéros spéciaux pour communiquer sur les maltraitances dont ils sont témoins. Nous avons quand même fait 147 alertes maltraitance cette année. Nous jouons pleinement notre rôle de service à la personne. Nous mettons tous ces indicateurs à disposition de nos équipes, partenaires et associés. Nous mettons surtout en avant ce qui est utile. Nous communiquons une fois que les résultats sont là. Nous ne voulons pas utiliser nos arguments pour vendre plus s’ils ne sont pas accompagnés de résultats chiffrés tangibles.
TG : Comment vos actions s’inscrivent-elles dans votre raison d’être “Agir pour que chacun vive pleinement le monde qui nous entoure” ?
M.G : Chaque mot dans notre raison d’être a un sens réfléchi. Pour nous, “agir” est une volonté commune d’apporter une solution à un problème concret : l’accès difficile à la santé visuelle pour certaines personnes. “Pour que chacun” signifie que personne ne doit être laissé de côté. “Vivre pleinement” signifie que peu importe le niveau d’autonomie de la personne, elle doit être en capacité totale d’utiliser ses 5 sens de façon durable et “le monde qui nous entoure” c’est pouvoir profiter de son environnement. Cette raison d’être est animée avec toutes les actions que nous mettons en place au quotidien pour que nos équipes comprennent pourquoi elles font ce métier et l’importance du collectif pour réussir « dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit ». J’ai mis en place par exemple des flash infos où tous les 15 jours je donne à mes équipes, les informations clés de la boîte et les directeurs des pôles font la même chose Cette raison d’être est également véhiculée par nos agitateurs de valeurs, représentants l’ensemble des équipes qui composent l’entreprise,
TG : Avez-vous rencontré des difficultés en interne ?
M.G : Nous n’avons pas rencontré de difficultés. Le fondement de l’entreprise dès le jour 1, c’était de créer un service pour les patients, une nouvelle capacité à faire leur métier pour les opticiens de santé et amener une traçabilité complète sur ce qu’ils font et sur les prix pratiqués. Par exemple, quand on est passé en société à mission dans nos statuts, cela s’est fait naturellement. Nous recrutons en expliquant notre vision du métier afin que chaque collaborateur soit aligné avec nos valeurs, nos attentes et notre ambition collective au service des patients et de leurs aidants. On veut avoir un système où nos collaborateurs comprennent ce qu’ils font au quotidien et pourquoi ils le font surtout. On veut que nos chaînes de valeurs soient toutes cohérentes.
TG : Avez-vous des résultats à nous partager ?
M.G : Le Grand Prix de la Good Économie a mis en avant notre initiative, c’est certain. On est passé de 1 salarié à 66 en 7 ans, de 0 indépendant à 50. La première année on a équipé 112 personnes, cette année on va en équiper 17 000. On fait 40% de croissance annuelle. On pousse à faire reconnaître l’utilité de l’opticien de santé et sa capacité à travailler en délégation de tâches avec le médecin ophtalmologiste, notamment sur les lieux de vie des patients. Pour nous la croissance c’est plus de personnes qui ont accès à la vue et des équipes engagées pour les servir La moyenne d’âge de nos publics est de 70 ans. Aujourd’hui la France compte 2 millions de personnes âgées dépendantes, d’ici 2040 elles seront 4 millions.