Publicité et impact : où en est-on des goodies ? Rien que sur le Tour de France, ils sont pas moins de 18 millions à être distribués. Une catastrophe environnementale dont personne ne semble s’inquiéter. Pour changer la donne, le spécialiste des objets éco-responsables Besight s’associe avec la direction de l’écoconception de Veolia pour développer des objets publicitaires BUD : Beaux, Utiles et Durables®. Rencontre avec Wilfrid De Conti, fondateur de Besight.
The Good : Pouvez-vous nous raconter la genèse du concept des objets publicitaires BUD ?
Wilfrid De Conti : Après une expérience dans la mode éthique et éco-responsable, Jean-Gaël et moi-même sommes tombés par hasard sur le marché des “goodies”. Lors d’un événement business sur le développement durable, nous avons été invités à témoigner pour partager notre expérience d’éco-concepteurs de produits textiles. A cette occasion, nous avons découvert la quantité d’objets inutiles distribués et leur qualité bas de gamme. Après une étude du marché, nous avons découvert qu’aucune entreprise sur le marché n’abordait le sujet de manière approfondie.
Forts de notre expérience, nous nous sommes donc mis en tête d’appliquer nos connaissances au marché du goodies.
Petit à petit, nous avons cherché à comprendre ce qui faisait qu’un objet allait durer dans le temps et avoir un impact environnemental le plus faible possible. C’est là qu’est né le concept de BUD : Beau, Utile et Durable®. Ces trois critères ont un effet vertueux et maximisent le potentiel d’utilisation d’un objet, tout en cherchant à réduire au maximum son impact environnemental.
The Good : Concrètement, quels sont-ils et comment se rendent-ils utiles et responsables ?
W. D-C. : Pour choisir des objets BUD®, Besight a créé une charte qui décrit la philosophie de sélection des objets. Voici un résumé de chaque principe :
- Le Beau se rapporte à la perception de qualité d’un objet. Plus cette perception est bonne, plus l’objet a des chances d’être utilisé et conservé.
- L’Utile se rapporte à l’usage d’un objet. Il doit avoir un intérêt pour l’utilisateur et l’amener vers une démarche de sobriété matérielle, à l’opposé du jetable.
- Le Durable se rapporte à la résistance d’un objet d’une part et à son impact sur l’environnement d’autre part. L’ensemble du cycle de vie est considéré dans ce critère.
La charte BUD est également accompagnée d’un indicateur environnemental qui évalue ces critères de manière plus objective. Le résultat est un score sur 100 qui prend en compte des critères environnementaux comme le bilan carbone, la recyclabilité de l’objet, des critères de qualité, etc…
The Good : Comment votre collaboration avec Veolia a-t-elle vu le jour et quels sont les objectifs que vous avez fixés ensemble ?
W. D-C. : Nous recherchons à délier le vrai du faux sur le sujet de la recyclabilité des objets. Un scandale en particulier nous a mis la puce à l’oreille, suite à l’apparition sur le marché d’une étude concernant un plastique à base de bambou. L’étude mentionnait notamment des problèmes sanitaires et de recyclage…
De plus, le marché du goodies est caractérisé par de nouveaux matériaux, arrivant sans cesse sur les étagères des fournisseurs, sans que leur recyclabilité n’ait été étudiée au préalable. Il était donc compliqué de se tenir informé de la “vraie” recyclabilité des objets.
C’est pourquoi nous avons rapidement contacté la fédération du recyclage (FEDEREC) qui nous a mis en relation avec la direction de l’éco-conception de Veolia France. Très rapidement, nous avons compris que nos enjeux étaient alignés et nous avons décidé de collaborer ensemble pour monter respectivement en compétence sur la véritable recyclabilité des objets.
La logique de notre démarche commune se résume en une phrase : “plus on sait, mieux on fait”. En construisant ensemble cette base de données d’informations, nous pouvons ensuite conseiller les fournisseurs pour qu’ils fassent les bons choix en matière d’éco-conception et d’économie circulaire.
Et notre intuition initiale s’est avérée : un très grand nombre d’objets vendus sur le marché comme recyclables ne possédaient même pas de filière de collecte… Alors de là à ce qu’ils soient valorisés…
The Good : Parmi les clients que vous avez jusqu’à présent accompagnés dans leur communication par l’objet, un exemple phare dont vous êtes fiers ?
W. D-C. : Nous sommes fiers de tous les projets réalisés avec nos clients. Mais en particulier, nous pourrions citer le welcome pack de la société Showroomprivé qui a été entièrement éco-conçu.
La proposition initiale qu’ils avaient reçue intégrait des références typiques du greenwashing : des mugs en plastique chargés en fibre de bambou, posant un double problème sanitaire et de recyclabilité…
The Good : De manière plus globale, quels sont les enjeux liés à l’éco-conception ? Comment engager la société à adopter l’éco-conception au quotidien ?
W. D-C. : Il existe deux enjeux majeurs liés à l’éco-conception : l’intégration de la démarche en amont des cycles de développement des produits ou service, et la sollicitation d’expert des sujets concernés par les produits ou services développés.
Dans le cas particulier des objets, il faut tout d’abord avoir conscience des impacts principaux que peuvent avoir les objets. Cela demande un premier audit qui permet d’établir les principaux leviers de diminution de l’impact environnemental.
Ensuite, il faut s’entourer d’experts dans tous les domaines concernés par ces impacts. Dans notre cas, Veolia pour la recyclabilité et Sustainable Metrics pour les bilans carbone. Sans eux, l’indicateur environnemental de Besight n’aurait jamais vu le jour.
Pour engager la société à adopter l’éco-conception, il existe plusieurs solutions :
- Communiquer via un affichage environnemental simplifié afin de rendre compte de l’impact environnemental d’un objet en un coup d’œil. Il s’agit, en quelque sorte, d’un premier niveau de sensibilisation.
- S’intégrer dans les groupes de discussion qui établissent les réglementations au niveau du gouvernement. Plus long mais indispensable pour insuffler le changement à grande échelle.
- Mettre en lumière les problèmes causés par les objets non éco-conçus. Lorsque le problème est visible, il est plus difficile de lui tourner le dos.
Bien-sûr, nous agissons sur ces trois leviers afin de maximiser notre impact.
The Good : La RSE chez Besight, ça s’impose comment ?
W. D-C. : C’est un véritable ADN. Je dirai même que le recrutement se fait principalement en fonction de l’attrait pour ces sujets.
Nous investissons beaucoup de temps et d’argent pour avoir une démarche sérieuse et approfondie. D’ailleurs, malgré la petite taille de notre entreprise (10 personnes au total), nous avons un pôle RSE dédié à ces sujets en interne qui se nomme ESE : Engagement Social et Environnemental.
Il s’agit d’un engagement tel qu’il fait partie intégrante de la vision de notre société. Et nous allons d’ailleurs devenir entreprise à mission d’ici la fin de l’été. Cela nous permettra d’officialiser notre engagement en faveur de tous ces sujets au travers du cadre proposé par la loi PACTE. Notre mission sera donc inscrite dans les statuts de la société afin qu’ils y soient protégés.