14/12/2020

Temps de lecture : 5 min

Webinaire Utopies x The Good « Passer de la Raison d’Être à la raison d’agir » : le debrief

A l’occasion de la publication de son étude consacrée au bilan de la Loi Pacte, 1 an et demi après sa promulgation, le cabinet Utopies a organisé, en partenariat avec The Good, un petit déjeuner virtuel vendredi 11 décembre. Elisabeth Laville, fondatrice d’Utopies, a présenté les enseignements clés de l’étude et un nouveau référentiel d’analyse des pratiques. S’est engagée ensuite une riche discussion avec Coralie Dubost, députée de Montpellier, rapporteure thématique de la loi Pacte, Emery Jacquillat, Président de la Camif et Président de la communauté des entreprises à mission et Mathias Vicherat, Secrétaire Général de Danone. Retour sur cet échange autour d’ un sujet qui passionne (+ de 1100 inscrits au webinaire) et qui questionne.

A l’occasion de la publication de son étude consacrée au bilan de la Loi Pacte, 1 an et demi après sa promulgation, le cabinet Utopies a organisé, en partenariat avec The Good, un petit déjeuner virtuel vendredi 11 décembre. Elisabeth Laville, fondatrice d’Utopies, a présenté les enseignements clés de l’étude et un nouveau référentiel d’analyse des pratiques. S’est engagée ensuite une riche discussion avec Coralie Dubost, députée de Montpellier, rapporteure thématique de la loi Pacte, Emery Jacquillat, Président de la Camif et Président de la communauté des entreprises à mission et Mathias Vicherat, Secrétaire Général de Danone. Retour sur cet échange autour d’ un sujet qui passionne (+ de 1100 inscrits au webinaire) et qui questionne.

2020 aura été sans conteste l’année de la Raison d’Être. Et au moins 3 raisons expliquent cet alignement des planètes.

La loi Pacte, promulguée en mai 2019, lui a donné visibilité et force. En médiatisant la notion de Raison d’Être, la loi Pacte lui a conféré sa légitimité. Elle a aussi, selon la députée Coralie Dubost, créé le désir. Les entreprises qui veulent s’engager sur ce chemin ont désormais les arguments nécessaires pour convaincre leurs parties-prenantes. La loi Pacte lui a aussi conféré un cadre puissant. Là où les plateformes de marque corporate (définition d’une vision, d’une mission, de valeur), étaient avant tout un outil de branding, la Raison d’Être s’inscrit pleinement dans la stratégie de l’entreprise, en fixant un cap. La définition de la Raison d’Être engage les dirigeants, qui a leur tour doivent « embarquer » l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise : salariés, actionnaires, fournisseurs, sous-traitants. Le processus, majoritairement contributif et fédératif, est capital, puisqu’il permet de se questionner sur la valeur créée par l’entreprise et de s’approprier la raison d’Être. La notion de « chemin de transformation » revient souvent dans la discussion. Emery Jacquillat rappelle qu’à la Camif, la définition de la Raison d’Être a pris 2 ans et demi. Le temps nécessaire de l’introspection, de l’écoute et du dialogue, et du choix de chacun des mots.

La crise du Covid 19 a quant à elle contribué à donner du sens à la démarche. Plateformes de marque et Raison d’Être formulées jusqu’alors avaient tendance à focaliser leur formulation sur l’activité même de l’entreprise, très orientées client. L’étude Comfluence a relevé que les Raisons d’Être écrites en 2020 intègrent dorénavant mieux l’impact de l’entreprise sur la société dans son ensemble (environnement, climat, impact local, social, …). Ainsi la présence du mot « durable” dans les formulations a augmenté de 8,2 points entre mars et juin 2020[1]. Cet engagement dans les mots, de la prise de conscience du rôle sociétal des entreprises et de la « responsabilité d’agir » selon Emery Jacquillat, peut être mis en regard de la forte implication de certaines entreprises pendant la crise et le 1er confinement. Beaucoup se sont engagées têtes baissées dès le mois de mars pour aider les Français – et parfois pallier aux manquements de l’administration publique. Réorientation des outils de production pour fabriquer les produits nécessaires à la protection des Français (masques, gels hydroalcooliques, voire respirateurs), soutien des professionnels de santé, approvisionnement continu de tous les rayons de supermarchés réels et virtuels, les entreprises ont répondu présentes, et parfois au-delà de leurs métiers / champs d’actions originels. Ces actes forts ont rappelé leur rôle incontournable dans la société et pour l’intérêt général. Certains évoquent même un rôle « politique » des entreprises.

C’est une attente forte des consommateurs : 88% d’entre eux souhaitent une plus grande implication des entreprises et des marques pour que la société change[2].Les premiers bilans d’image des marques qui ont fait 2020 ont montré que celles qui se sont engagées pour la société ont nettement progressé, comme nous l’avons analysé dans notre Good Book. C’est aussi une attente forte des salariés : une étude IFOP de janvier 2020[3] révélait que 37% de salariés seraient prêts à gagner moins en échange d’un travail qui ait un sens ! Autre signe d’un alignement des planètes et de vents favorables : l’engouement des investisseurs pour les investissements responsables.

Et cela se traduit dans les chiffres : au 1er décembre 2020, 96 sociétés avaient publié leur raison d’être et 75% des entreprises du CAC 40 affichaient leur souhait d’inscrire une raison d’être dans leurs statuts en juin 2020. Selon une étude de l’Union des Marques, 48% d’entre-elles réfléchissaient à leur Raison d’Être en sortie de confinement[4].  La loi Pacte a aussi mis en lumière une nouvelle approche de l’entreprise, en consacrant le statut d’entreprise à mission, adopté par 42 entreprises cette année, à l’instar de Danone, dont 99,5% des actionnaires ont approuvé cette modification engageante des statuts de l’entreprise.

Face à cet engouement, certains redoutent le « mission washing » ou le « good washing » : que la Raison d’Être reste du domaine de la communication, sans se traduire dans les actes. Mathias Vicherat a rappelé l’importance de la mise en place d’indicateurs suivis par toutes les business units et les salariés de Danone. Pour Emery Jacquillat, « quand la mission est claire, elle éclaire chacun » : autrement dit, la raison d’être doit être suffisamment claire pour se traduire dans le budget de l’entreprise, mais aussi dans la transformation de ses activités. Par exemple, pour augmenter la production de l’offre Made In France, Camif n’a pas hésité à devenir un éditeur de meubles avant d’être un distributeur !

Utopies a de son côté développé un référentiel en 10 points – les 10 C – afin d’analyser les pratiques. Il s’agit d’un excellent guide pour qui souhaite se lancer dans un processus de réflexion sur sa Raison d’Être afin de connaître les points clés du « chemin » et de la formulation, et éviter les pièges de formules trop creuses et non-transformatives.

Car là réside le secret d’une loi Pacte réussie : amener à une profonde transformation de l’économie, une économie qui concilie valeurs et création de valeur ; une économie qui concilie « people, planet & profits » selon la formule célèbre de la triple bottom line. Pour cela les entreprises ont besoin d’un cadre, fourni par la loi Pacte. Elles auront besoin d’être soutenues par un cadre Européen, comme l’a souligné Coralie Dubost. Elles auront aussi besoin de managers formés par des écoles et des enseignants rompus à la transformation positive des entreprises, comme l’ont souligné quelques auditeurs.

La Raison d’Être a donc de bonnes Raisons d’Exister pour quelques années encore !


[1] Comfluence, les entreprises du CAC 40 à l’âge de la raison d’être (mise à jour le 30 juin 2020)

[2] Les entreprises et les marques : acteurs engagés du monde d’après. Etude Viavoice pour le Syndicat du conseil en Relations Publics (avril 2020).

[3] Sondage Ifop pour Philonomist, auprès de 970 salariés de 18 ans et plus, janvier 2020.

[4] Covid-19 : Baromètre Marques et marketeurs en temps de crise. Union des Marques, juillet 2020.

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