Loi Pacte, pression réglementaire, traités internationaux, données extra-financières, neutralité carbone, analyse de matérialité, normalisation, ODD, scoring, labels… La notion de développement durable existe depuis 1987 suite au rapport de commission Bruntland à l’ONU mais nous nous sommes appliqués à la complexifier via la RSE depuis 34 ans jusqu’à désintéresser l’entreprise de sa propre performance durable. Comment alors revenir à l’essentiel? Voici 10 points à observer pour se recentrer sur sa performance.
La RSE a été pensée à l’origine pour nourrir les objectifs du développement durable dont le rapport de l’ONU donnait la définition suivante “ un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs”. Un rôle plus proche de la performance que de la norme ou d’une simple responsabilité de “compliance ESG” !
Le premier terme “Responsabilité” de l’acronyme RSE a pesé lourd dans l’inconscient collectif du monde de l’entreprise, il soutient l’idée que cette discipline a été créée pour rendre les dirigeants plus responsables et souligne donc leur potentielle irresponsabilité.
Motivés de la sorte, on peut facilement comprendre pourquoi selon une étude BPI France “seulement 25 % seulement des dirigeants d’ETI sont convaincus que la RSE peut être source de compétitivité tandis que 62% lui reprochent sa lourdeur administrative.”
Pourtant, une étude plus récente de Mc Kinsey souligne que 83% des cadres dirigeants et professionnels de l’investissement pensent qu’un programme ESG apportera plus de valeur aux actionnaires en cinq ans qu’aujourd’hui et qu’ils seraient prêts à payer une prime médiane de 10% aux entreprises investies dans le développement durable.
Il ne faut donc pas jeter le bébé avec l’eau du bain et réhabiliter le développement durable et son bras armé la RSE au service de la performance durable !
Pour commencer, sortons de l’image normative et réglementaire de la RSE et projetons nous dans une logique de performance durable avec 10 questions essentielles sur votre activité à partager avec vos parties prenantes, afin d’évaluer votre potentiel.
10 questions essentielles pour évaluer votre potentiel de performance durable
- UTILITÉ :
Que manquerait-t-il d’utile à la société si mon entreprise disparaissait ? Et si mon secteur d’activité disparaissait ? Ce qu’il manquerait d’essentiel est-il imputable à mon savoir-faire ? Mon offre actuelle ? Si ce n’est pas le cas, comment recentrer mon activité vers davantage d’utilité ?
- RISQUE :
Quels risques environnementaux, sociétaux, économiques pourraient remettre en question cette utilité dans un futur proche ou éloigné ? Ces changements impacteront-t-ils mon modèle d’affaires ou la légitimité de mon savoir-faire ? Comment transformer ces risques en opportunités de développement ?
- IMPACT :
Le fonctionnement de mon activité dépend-t-il d’une exploitation intensive des ressources naturelles ou humaines ?
Son impact est-il intégré à mon modèle de rentabilité et de développement? Comment réduire cet impact pour renforcer durablement mon modèle de performance et procéder autrement pour en faire un avantage compétitif ?
- ENGAGEMENT :
Quel engagement fondamental pourrais-je déduire de ces questions pour renforcer l’utilité, la pérennité et la performance de mon entreprise ?
Comment cet engagement peut-il réconcilier ma raison d’être, ma raison d’agir avec mon offre, ma culture d’entreprise, mes investissements RSE et ma posture de communication ?
- COMBAT :
Quels combats majeurs liés à cet engagement fondamental dois-je défendre ? Avec quels ambassadeurs internes, quels objectifs, quels KPI et quel programme de transformation de mon écosystème économique, sociétal et environnemental ?
- SINGULARITÉ :
Quels éléments de singularité de mon entreprise pourraient constituer des marqueurs forts de cet engagement futur (savoir-faire, organisation, histoire, culture, collaborateurs clientèle…) ?Avec quel positionnement RSE, quel programme et en s’appuyant sur quels KPI propriétaires et universels ?
- PROSPECTIVE :
Comment anticiper l’impact des changements actuels et futurs pour construire la trajectoire de votre modèle de performance durable ? Quels sont les risques et les opportunités qui peuvent menacer ou stimuler votre modèle actuel ? Comment utiliser l’utopie pour construire la réalité ?
- OWNERSHIP :
Ai-je les moyens de mes ambitions de transition en termes de gouvernance, de statut juridique, de structure capitalistique ? Si ce n’est pas le cas, est-il possible de les renforcer en conduisant des réformes structurelles pour construire l’avenir ?
- ENTREPRENEURIAT :
Quelles actions d’innovation, de recherche, de recrutement, de partenariats stratégiques et joint-venture innovantes entreprendre ? Comment les concrétiser en créant des alliances de performance durable dans ma filière, mon marché, mon territoire (Joint venture sociale, acquisitions, techforgood, crowdfunding,…) ?
- RESULTAT :
Comment mesurer la contribution et la performance économique de mon modèle cible et le rendre visible sur un compte d’exploitation ? Avec quels outils de mesure d’impact l’objectiver ? Comment financer les investissements nécessaires à la réalisation de la trajectoire de transformation de mon activité ?
Ces 10 questions peuvent être posées dans un premier temps en comité de direction, mais l’essentiel est d’impliquer l’ensemble de vos parties prenantes dans les réponses pour créer les conditions d’une performance durable co-construite avec tout votre écosystème (collaborateurs, concurrents, partenaires, institutions, ONG, Investisseurs, actionnaires, collectivités territoriales, consommateurs, citoyens, élus…)
Il est temps de passer de la bonne conscience à l’activisme économique pour redéfinir les critères d’une performance durable qui associe facteur économique, sociétal et écologique !
Guillaume Rotrou est Directeur de l’activité Positive Impact de l’agence Insign – Creative Partners