Pourquoi les limites planétaires accélèrent la transformation des entreprises
Peut-on entreprendre en respectant les limites planétaires ? La question était posée sur le plateau de Big Média en partenariat avec The Good le 2 avril dernier dans le cadre de Jour E, l'événement de BPI France qui rassemble les dirigeants d'entreprises engagés à Lille.
S’il est avéré que les 9 limites planétaires constituent des risques systémiques majeurs pour l’environnement économique des entreprises, celles-ci ne sont pas toutes encore emparées du sujet. Il y a pourtant urgence. Des outils peuvent les aider. Morceaux choisis.
« Sans environnement, il n’y a pas d’économie ». La phrase est lâchée par Jean-Yves Wilmotte directeur biodiversité chez Carbone 4. « Nous sommes bien obligés de respecter ces limites planétaires ». Mais en avez–vous déjà entendu parler ? Si le carbone est devenu le symbole de la lutte pour la préservation de la planète, on en oublierait presque les autres enjeux, tout aussi cruciaux.
Comme le rappelle Jean-Yves Wilmotte, ces seuils critiques, définis par des scientifiques du Stockholm Resilience Centre en 2009, préservent l’équilibre indispensable au bon fonctionnement de notre planète Terre. Ces limites sont au nombre de 9 :le changement climatique, la dégradation de la biodiversité, la perturbation des cycles de l’azote et du phosphore, le changement d’usage des sols, le cycle de l’eau douce, l’introduction d’entités nouvelles dans la biosphère comme les plastiques ou pesticides, l’acidification des océans, l’appauvrissement de la couche d’ozone ou encore l’augmentation de la présence des particules fines en suspension dans l’air dans l’atmosphère. Et elles sont interdépendantes.
En juin 2024, seules les 3 dernières limites de cette liste n’avaient pas été franchies. Et l’acidification des océans serait la prochaine sur la liste.
Agir sur sa stratégie ou apporter des solutions
Au sein du Réseau Alliances premier réseau des acteurs économiques engagés pour une économie plus responsable dans les Hauts-de-France, ces limites planétaires sont au cœur des échanges avec les 350 adhérents. Pour Lucile Janssoone,Responsable Accompagnement à la transformation des entreprises au sein du Réseau Alliances : « Ces sujets, nous les abordons pour sensibiliser les chefs d’entreprise afin qu’ils puissent intégrer ces enjeux le plus tôt possible». Un exemple : laCartonnerie Gondardennes qui limite sa consommation d’eau grâce à la création d’une station d’épuration pour agir en circuit fermé.
Tout dépend évidemment de la typologie d’entreprise : « il y a des entreprises plus classiques qui font en sorte de regarder en quoi leur stratégie peut agir sur l’eau ou encore la biodiversité, précise Jean-Yves Wilmotte, et il y a celles qui apportent des solutions pour réduire l’impact, comme proposer l’usage du vélo davantage que la voiture. » C’est le cas de Webreathe représenté par Ambre Delafontaine responsable de la communication. qui vise à optimiser le flux de voyageurs dans les transports.
« Nous fournissons l’information en temps réel sur la fréquentation des réseaux. La technologie offre la possibilité de limiter les trajets inutiles et de faire des choix. Cela permet de limiter les émissions sans un investissement lourd ». En résumé il s’agit de passer d’une économie de l’offre à une économie de la demande.
Un produit encore valable en 2050 ?
Tout prendre en compte en même temps s’avère complexe mais des outils existent. On peut citer notamment le SCAP, le Score de Compatibilité avec les Accords de Paris développé par Carbone 4. Pour Jean-Yves Wilmotte « l’idée est de regarder la pertinence des produits et services dans une perspective d’un monde bas carbone. Peut-on ou non garder ce produit ou ce service à long terme ? »
Du côté du réseau Alliances, la coopération est valorisée. « Nous mettons les entreprises en réseau » explique Lucille Jansoone. « Chacun va pouvoir challenger l’autre sur sa démarche »
Tous s’accordent pour dire qu’entreprendre en respectant les limites planétaires est possible mais pas à n’importe quel prix. Un changement de modèle est nécessaire. « La transparence est essentielle pour ne plus faire comme avant » pour Ambre Delafontaine. « Ne pas oublier que ces limites planétaires nous rattraperont et qu’il faudra dans tous les cas les traiter », précise Jean-Yves Wilmotte. Enfin « si votre entreprise n’existait pas, de quoi manquerait le monde ? » Cette question posée aux entrepreneurs par Lucile Jansoone a de quoi faire réfléchir concrètement sur l’avenir.