Plus d’un millier de personnes menées par des collectifs scientifiques et écologistes ont manifesté samedi à Paris contre la destruction du vivant et les maladies provoquées par l’usage agricole massif des pesticides. « Les pesticides tuent », « plus de chants dans les champs », « Pesticides, la peste d’ici », proclamaient des pancartes du cortège très coloré et sonore.
L’Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, doit examiner fin mai une loi adoptée au Sénat (chambre haute), sous pression d’une partie du monde agricole. Celle-ci vise à réautoriser par dérogation l’acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France depuis 2018 en raison de sa toxicité pour les pollinisateurs, comme les autres néonicotinoïdes, mais permis ailleurs en Europe. Le cortège, nommé « Printemps bruyant », a été initié par quelques dizaines d’organisations dont les collectifs « Scientifiques en rébellion », « Alerte des Médecins contre les Pesticides » ou encore l’association Agir pour l’Environnement. D’autres organisations comme la Ligue pour la protection des oiseaux ou Greenpeace les ont rejoints.
Isabelle Marchand est venue de l’ouest de la France: « ma fille de 16 ans souffre d’une leucémie lymphoblastique » et « nous sommes riverains d’un champ cultivé en agriculture conventionnelle, qui utilise beaucoup de pesticides pour le blé, le maïs, la pomme de terre« . « J’ai fait analyser les poussières de ma maison, sous contrôle d’huissier: on a retrouvé du lindane et du diuron« , des produits interdits, déplore-t-elle.
20 millions d’oiseaux
« On perd encore 20 millions d’oiseaux par an à l’échelle de l’Europe et c’est principalement dû aux intrants chimiques« , souligne Cédric Marteau, directeur général de la LPO. Aux agriculteurs, « on leur dit que le modèle est sans issue (…): la profession est en souffrance — taux de suicide, mais aussi perte de revenus — et donc il faut sortir (de ce) schéma très meurtrier pour leur propre santé, pour la santé des concitoyens, mais aussi pour le vivant« , argumente-t-il.
Les agriculteurs « ont été enfermés par les firmes productrices de pesticides dans des modèles » qui « mettent à bas toute une chaîne biologique« , dénonce encore l’eurodéputée écologiste Marie Toussaint. En France, le géant allemand de la chimie Bayer est assigné en justice par une famille dont le fils souffre de graves malformations qu’ils imputent à son exposition in utéro au glyphosate. La décision a été mise en délibéré au 31 juillet.
Depuis fin 2018, le produit est interdit en France pour un usage domestique. Son approbation en Europe a cependant été renouvelée en novembre 2023 pour 10 ans « sous réserve de certaines conditions et restrictions« .