Réduire nos émissions de gaz à effet de serre passe inévitablement par une solarisation massive de nos infrastructures existantes. Des toits de friche, parking et bureau qui ont l’avantage d’exploiter les supports existants et de produire une énergie de proximité. Un photovoltaïsme tactique qui rassemble des acteurs divers comme SNCF Gares & Connexions, le grossiste alimentaire Metro et les métropoles de Nantes, Lyon et Saint-Etienne.
Toutes les énergies renouvelables sont bonnes à prendre. D’abord parce qu’elles produisent de l’énergie sans trop émettre de CO2 – leur fabrication mise à part. Ensuite parce que la diversité d’un mix énergétique favorise sa résilience en cas d’imprévu – l’absence de vent peut se compenser par la force du soleil, ou celle du nucléaire par exemple. C’est dans cette logique climatique et énergétique que de plus en plus d’acteurs développent des plans de solarisation immobiliers. L’intérêt majeur, partir des infrastructures existantes pour éviter d’artificialiser davantage et de fabriquer du neuf.
La SNCF à l’avant-garde
Le réseau SNCF Gares & Connexion vient de lancer un plan ambitieux pour « photovoltaïser » l’ensemble de ses gares d’ici 2030. L’idée, recouvrir ses infrastructures de 1,1 million de mètres carrés de panneaux solaires pour produire entre 150 et 200 mégawatts, soit l’équivalent de la consommation électrique de 150 000 personnes. Pour y parvenir, ce sont tous les parkings, quais et toitures de halles, bâtiments et friches ferroviaires qui seront mis à contribution. La filiale du groupe SNCF prévoit déjà d’ici 2024 de mettre en service 190 000 mètres carrés d’ombrières photovoltaïques sur les parkings de certaines gares. Plus de 150 stations seront équipées pour produire 25 à 30 mégawatts de puissance électrique. Une ambition que partage à son échelle la filiale française de l’entreprise Metro. Accompagné par Réservoir Sun, une société dédiée à l’autoconsommation solaire, le grossiste souhaite solariser une vingtaine d’entrepôts français. Avec 17 000 mètres carrés couverts, c’est une puissance de 3,5 mégawatts qui serait produite, assez pour couvrir 15 % des besoins énergétiques des sites concernés.
Les métropoles misent sur leur capital solaire
Mais les entreprises sont loin d’être les seules à solariser leurs toits. La loi française sur la transition énergétique d’août 2015 prévoit d’atteindre 40 % d’énergie renouvelable d’ici 2030. Les villes étant de grosses consommatrices d’énergie, elles doivent mettre la main à la pâte. La métropole de Lyon par exemple, a lancé en mai 2022 un premier appel à manifestation d’intérêt pour équiper les toitures d’une douzaine de collèges dans la périphérie de la ville. Une stratégie inscrite dans la perspective du Grand Lyon afin d’atteindre d’ici 2030 l’équivalent de 250 GWh d’énergie solaire. Il faut dire que la métropole avait pris du retard sur ses objectifs, consommant six fois plus d’électricité qu’elle n’en produisait. Dans la métropole de Saint-Etienne, plus de 150 bâtiments seront recouverts à terme par des panneaux photovoltaïques. Environ 200 000 mètres carrés de surface, qui représentent la consommation électrique moyenne de 12 000 foyers, hors chauffage. À Nantes et sa périphérie, un logiciel a permis quant à lui d’analyser le potentiel solaire du patrimoine environnant. La métropole nantaise a ainsi identifié 400 bâtiments solarisables, pour massifier intelligemment le photovoltaïque urbain et prioriser les projets les plus rapides et rentables.
Quand les agriculteurs plantent des panneaux
Loin des villes, les agriculteurs eux aussi se solarisent. Le potentiel est énorme : 45 % de la superficie du territoire français est réservée à l’agriculture. C’est de ce constat qu’est né l’agrivoltaïsme, une méthode qui consiste à créer une synergie entre production agricole et photovoltaïque. Mais un risque de diminution des rendements peut survenir selon les conditions climatiques auxquelles le sol est soumis et la méthode utilisée (centrales au sol, ombrières fixes ou mobiles…). Des études plus poussées permettront de déterminer quelle technologie est la plus efficace selon quel type de climat. Mais qu’il s’agisse des agriculteurs, des entreprises ou des villes, tous se lancent peu à peu dans une solarisation tactique qui s’adapte à l’existant urbain et rural. Mais certaines problématiques restent en suspens, notamment la fabrication des panneaux, essentiellement réalisée en Chine malgré un impact environnemental et social insoutenable. Relocaliser la fabrication des panneaux est donc un enjeu majeur, tout comme son recyclage, dont les avancées sont très encourageantes.